à l’oreille





DS 003
La fougue, le panache, l’énergie ; sans débordement

par LeBeauSon - Avril 2022


Perception d’ensemble

L’ensemble DS 003 (la cellule et un préampli phono idoine, sobrement nommé Phono « EQ »), technologiquement unique, est « monstrueusement » impressionnant par la prise de possession affirmée d'un espace en 3 D tout autant que par la pression sereine ou le corps conférés à tout type de musique.

La précision des capacités d'exploration jusqu’à un extrême grave hadal est tout simplement stupéfiant. Point – entre autres - sur lequel je doute qu'il y ait beaucoup de challengeurs.

Et si (considération à relativiser car dépendant peut-être du bras de lecture) l’aigu semble plafonner un pouillème en dessous du feu d'artifice général - pas par manque de minutie mais par une palette harmonique légèrement écourtée dans le foisonnement d'ensemble -, la délectation d’une franchise aussi volontaire que raffinée est absolument totale, quand bien même, dans la liste de nos critères élitistes, nous n’eussions pas boudé un sens plus délicat de l’expressivité.

Un objet résolument hors des sentiers battus, une source de plaisir uppercut incomparable.

DIAMs 6 ORANGEs

 

Code couleur pour ce banc d’essai : Orange (de 3 200 à 6 500 €), l’ensemble cellule + préampli étant affiché, semble-t-il, à 5 900 €.

DS 003 6

A chaque édition du Salon de Munich depuis… 10 ans ? j’ai été intrigué par d’étranges cellules phono - dont le corps éclairé en façade par un œil de robot a vraiment de l’allure - qui utilisent une technologie non pas nouvelle mais à ma connaissance exclusive.

La marque ? DS Audio.

Née au Japon il y a une bonne décennie, filiale de la Digital Stream Corporation, spécialiste de la technologie optique depuis plus de 25 ans.

L’idée d’une cellule optique, ou plus exactement « optico-mécanique », n’est pas nouvelle puisque l’invention de la chose remonte à 1969, je crois, et vient de Toshiba qui entendait patiemment développer le principe mais a finalement été battu en brèche par l’apparition du CD.

                                                               

Aussi lorsque j’ai appris que nous allions recevoir pour test une nouvelle DS Audio et son joli œil bleu de Cyclope ai-je été particulièrement réjoui.

Et pas déçu du voyage !

 

DS 003 7

Bon, je ne suis pas absolument sûr de comprendre intégralement ce qui se passe techniquement, aussi si vous voulez en savoir plus, vous trouverez tous les renseignements par ailleurs.

L’essai consacré ci-dessous à la cellule DS Audio doit être considéré comme un ensemble ou un système puisque la cellule dite « optico-mécanique » est accompagnée d’un correcteur RIAA de la marque. Par son principe, la cellule DS n’est pas compatible avec des préamplis phono conventionnels pour de simples raisons d’alimentation, de niveaux de sortie et d’impédance. Notez en revanche que la marque japonaise a la bienveillance de fournir le schéma de son Phono EQ en Open Source vers industriels ou particuliers.

Attention ensuite à ne pas confondre le principe de lecture « optico-mécanique » avec une lecture laser. D’autant moins que le signal issu du vinyle est bel et bien transmis par un stylet.

La cellule DS 003 en elle-même revêt une apparence classique à l’exception de la fente lumineuse verticale en façade, stylisée en étroite goutte d’eau, qui évidemment ne s’éclaire que lorsque le préampli est activé. Elle utilise classiquement une pointe diamant (je n’en connais pas le type de taille parce que je suis paresseux) qui s’enfonce dans le sillon pour y capter les signaux par micro-vibrations.

Là commencent les différences avec les cellules « traditionnelles » : quand celles-ci transmettent par un cantilever ces micro-vibrations à un ensemble aimant / bobine dont l’un est fixé sur le cantilever (soit l’aimant et on parle d’aimant mobile, soit les bobines et on parle de bobines mobiles) pour interagir électromagnétiquement avec l’autre, générant ainsi un signal électrique de très faible tension, les cellules DS utilisent le mouvement induit par le stylet à une ou désormais des LEDs projetant les micromouvements vers une cellule photoélectrique. Qui les traduit en signal électrique.

Que ce soit donc parfaitement clair : on est dans le monde de l’analogique !

La DS 003 – au corps en aluminium léger - correspond à une troisième génération de ce type de cellule et bénéficie par conséquent de diverses innovations.

Ainsi utilise-t-elle deux LEDs et deux cellules photoélectriques au lieu d’une auparavant, affinant l’isolation des canaux en optimisant le placement de chaque LED. La plaque occultante en aluminium est désormais en béryllium pur à 99.9% entraînant une baisse drastique du poids.

Concrètement, ces nouveautés se traduisent par une meilleure séparation des canaux et une notable amélioration du rapport signal/bruit par un bond de la tension de sortie : 70mV ! (Au lieu de 40 précédemment). C’est énorme, hors norme, et nécessite un préampli phono particulier comme évoqué plus haut.

Correcteur RIAA évidemment (on a dû écrire un truc à ce propos quelque part. Cherchez dans le site, je n’ai pas que ça à faire), il propose des réglages de filtre passe-bas, 25 ou 50 Hz, 6 ou 12 dB par octave, via un choix de prises RCA et un switch.

Pour info, nous avons choisi le mode à priori le plus « risqué », à savoir 25 Hz et 6 dB sans aucun problème lors des divers essais.

DS 003 9

DS 003 5

Protocole de l’essai : platine Brinkmann Bardo + bras 10.0, AudioNote Kondo Overture II, Accuphase E800, Mulidine Harmonie V3 « ++ », ppfff AVA II, câblage Wing, Van den Hul, Legato, Mudra.

 

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL :

Commençons par une petite précaution d’usage : une telle cellule nécessite vraiment de peaufiner drastiquement les réglages. En effet, quelques plages installent un petit doute sur la perception de l’équilibre tonal, une zone de creux dans le haut du médium - retrait plus perceptible en dynamique que sur une phrase linéaire - qui pourrait passer inaperçue tant d’autres qualités sont flagrantes.

Puisque nous sommes un peu aux limites du bras en réglage du VTA (Vertical Tracking Angle. Hi hi !) et compte tenu d’un stylet très rentré dans le corps de la cellule, je me demande alors si la légère inclinaison n’est pas en cause.

Ahem… Quand je pense que nous étions supposés faire comprendre l’obscurantiste monde de la hifi à des candides, pas sûr que ce soit le cas.

Faites confiance à votre magasin préféré.

Qu’à cela ne tienne : on démonte le joujou pour insérer une mince masselotte entre cellule et bras, pas dans l’idée d’ajouter de la masse mais de dégager suffisamment de hauteur pour un ajustage idéal de l’angle de lecture.

Quelques tâtonnements plus tard, on est rassurés par le réglage car la coquetterie tonale a disparu.

Allez : musique Maestro !

Von Karajan en l’occurrence, livrant une version plutôt inaccoutumée de la 5e Symphonie de Tchaïkovski (1966), prenant presque autant son temps (dans le premier mouvement en tout cas) que Sergiu Celibidache tout en jouant quand même davantage sur les variations rythmiques ; lecture moins enracinée dans la métaphysique, elle est fondamentalement plus imprégnée de pure beauté ; plastique, bien sûr, mais aussi intérieurement déchirante, évinçant l’emphase romantique par la sincérité du geste psychologique. Le Maître autrichien si souvent contesté (et parfois contestable) déroule ainsi toute la majesté de chaque pupitre de sa Rolls-Royce… Pardon, sa Wilhelm Maybach : le Philharmonique de Berlin.

Le moelleux de chaque pupitre est en ce jour soutenu par une sensation de corps, de ronflement wagnérien (au service de contrebasses magnifiées, mais pas seulement les contrebasses…), qui imposent une assiduité « sensationnelle », immersion assimilable à un voluptueux casque (audio) à la différence près d’une tridimensionnalité aussi consistante et monumentale qu’une cathédrale. Sans les réverbérations.

Lesquelles sont parfois écourtées par l’effronterie de la DS 003.

Teintes et matières sont fièrement différentiées, établissant des cuivres ressortissants aux trompettes d’Aïda, assénant un pur régal de vivre, une flamboyante présence des musiciens dans votre intimité ; présence qui toutefois n’est pas exactement incarnation mais plutôt envergure 3D dont la puissance nous implique sans nous laisser le choix : c’est comme ça et pas autrement !

Pas besoin d’aller chercher la musique : elle est livrée sur un plateau d’argent !

Il faut donc fournir un effort de concentration et décider de s’ébrouer dans la chaleureuse et confortable étreinte pour soupçonner un déroulement harmonique un rien court, d’autant plus que la gamme des timbres est inattaquable.

Un passage par une œuvre difficile suggère que, éventuellement, l’aigu manque d’un crépitement de diversité dans le feu d'artifice général : Black Angels (Thirteen Images from the Dark Land), George Crumb (paix à son âme) par le Concord String Quartet en 1973.

Œuvre dite « for electric string quartet » et décrite comme « Ode funèbre aux pires heures de la guerre du Viêt Nam, lambeaux sonores déchiquetés, calcinés, comme la terre ravagée par le napalm » (Gilles Macassar), elle fait, nonobstant, la part belle aux instruments réels, quand bien même elle contraint les musiciens à doubler leurs outils ne serait-ce que pour jouer instruments retournés (tête en bas) quelques extraits de « la Jeune Fille et la Mort ».

La carrure posée par la DS 003 sur les passages subliminaux scelle une rare vérité, amenant à un autre constat : le bruit de fond dû à la matière vinyle est plus marqué que souvent.

Marqué ne signifie pas « plus fort », mais plus différentié.

De fait constaterons-nous au fil des écoutes une discrimination des diverses variétés de la matière vinyle au long des âges ou éditions plus insistante que d’habitude ; un bien pour un mal ; ainsi – il faut le savoir - qu’une moindre tolérance aux poussières et autres scories outrées par l’énergie colossale déployée par DS 003.

Sur un opus où les cordes sont souvent galvanisées pour leur acidité (Black Angels donc), l’impression d’un aigu un rien simplifié ne se perçoit en aucun cas au détriment de l’assurance des matières, des boisés, de la plénitude des corps ou de la précision ! Bien au contraire, et c’est définitivement un point fort de cette cellule : l’aplomb.

Au péril d’un manque de frémissement ? A voir.

En tout cas, la proposition offerte par DS 003 tient plus de l’autorité que de l’atmosphère ou l’évanescence.

L’extension sidérante de la bande passante vers le bas du spectre sera révélée par le très émouvant titre de Björk : All Is Full of Love où les articulations des segments de soubassement, à défaut d’être prodigieusement flexibles, sont fermement enfouies du côté du magma sous-terrestre ; et c’est pour le moins captivant.

Cette piste est intéressante à plus d’un titre car, fondée sur des va-et-vient de croisements d’infra-grave, elle est parallèlement harmonisée de sections stridulantes, stridentes - pour ne pas dire saignantes - de saint-thé-teasers (priez pour nous !) dans le haut du spectre consolidant notre précédent ressenti : le dégagement harmonique supérieur stagne d’une épaisseur de trait en dessous du foisonnement du reste du spectre, mais contribue parallèlement à la densité générale déroutante, forcissant le trait sans jamais l’alourdir : l’encre de Chine contrastée de Corto Maltese (celui d’Hugo Pratt) s’allie à l’outrance hyperréaliste de Samuel Silva.

Timbres :

DIAMs 6 ORANGEs

 

Équilibre tonal : 

La pression conséquente et inépuisable exercée par la combinaison cellule/pré DS 003 renvoie bon nombre de convertisseurs numériques du côté des poussettes pour bébé, incluant celle du Cuirassé Potemkine. Une telle vigueur pourra déséquilibrer quelques systèmes anémiques. Même chers.

DIAMs 5 ORANGEs ?

DS 003 1

RÉALISME DES DÉTAILS :

On l’aura compris à l’écoute de Crumb et Björk, la définition de la cellule DS 003 ne se dessine pas par un ciselage harmonique de l’aigu ni un quelconque artifice dans ce secteur. Et ça, c’est tant mieux.

En 2011, le trio The Thing - Mats Gustafsson (saxophones), Ingebrigt Håker Flaten (basses) et Paal Nilssen-Love (batterie) – rejoint Neneh Cherry pour une forme d’hommage au beau-père de cette dernière (Don Cherry, donc).

Si le systématisme codé free jazz du trio norvégien/suédois est parfois agaçant, quelques passages (dont la touchante reprise de Martina Topley-Bird To Tough to Die), en font un album à la fois atypique et indispensable. En revanche, la pâte sonore en est lourde, limite brouillonne, particulièrement dans le bas du spectre, très très chargé et volumineux.

La cartouche (comme disent nos amis québécois) DS 003 déboucle remarquablement l’exercice alambiqué. Ce qui est d’autant plus intéressant que, comme nous l’avons évoqué précédemment, la DS 003 se caractérise par une poussée énergétique de peu d’équivalent, dépassant diverses Benz, Dynavector ou SPU réputées sur ce point. Pour autant, sa capacité à fouiller dans la bouillie sonore et à décrypter l’embrouillamini basse / batterie est indéniablement une de ses qualités majeures sachant qu’on suppose pouvoir aller plus loin encore en grimpant en gamme de bras.

Et, cependant que les à-pics des fronts d’ondes ne sont pas les meilleurs alpinistes que l’on connaisse, les effets de matière sur l’alto de Gustafsson façonnent un relief étonnant à l’instrument qui, sous l’autorité de la DS, s’invite frontalement dans votre salon. Juste à côté de Neneh Cherry tout en verve mais en aérienne rupture par un lyrisme moins formaté « free » que ses partenaires, trouvant habilement le moyen de ramener les élucubrations magistrales du trio vers une poésie antinomique.

Pas tant que la résolution soit la plus approfondie que l’on ait connue cependant que : la façon d’isoler les matières ou les statures dans un ambitus particulièrement large sculpte l’espace, impliquant une sorte d’intimité certes conquérante mais ô combien efficace, et impressionne grandement !

Sur une gravure Mercury d’anthologie, la musique à placer dans la catégorie « hymne national » - fréquente chez les compositeurs américains de la première moitié du 20ème -, celle de George Whitefield Chadwick ne déroge pas à la règle. Le Eastman-Rochester Orchestra, dirigé en 1956 par Howard Hanson n’hésite pas à en rajouter aussi bien à une fantaisie de Broadway vainqueresse qu’aux vagues naturalistes peignant plus intensément encore que Thomas Moran un Far West mythique.

Ouh là, c’est du costaud sous la maîtrise de la DS 003 ! On n’est pas loin de la horde de bisons déferlant dans la plaine. Plaine, plénitude, on est embarqués dans la charge.

On note cependant, même si ce n’est pas tout à fait le chapitre, que les modulations plus calmes et amples devraient être plus suavement félines…

Un (très) relatif manque d’air ?

Le revers de la statuaire burinée dans le marbre par l’ensemble DS 003 ?

DIAMs 5 ORANGEs

DS 003 4

SCÈNE SONORE :

Au-delà du constat que les musiciens semblent prendre plaisir à s’installer plus avant que souvent dans votre pièce, la scène sonore est assurément exceptionnelle : tridimensionnalité effective, étagements quasi-palpables, évidemment dépendants de la qualité de lecture de l’ensemble platine plus bras.

La meilleure démonstration passe par le dernier acte de Tosca, Vienne 1962, Leontyne Price, Giuseppe Taddei, Carlo Cava et… Herbert von Karajan… Un disque probablement d’origine Decca (John Culshaw est à la barre) mais édité par RCA en 1963.

Que ce soient l’introduction sur les remparts du Castel St Angelo - les échos mystérieux de l’aube, les cloches atmosphériques et, quelque part dans le lointain, le chant innocent d’un jeune berger -, où la profondeur est tout à fait extraordinaire, tout autant que lors des saignements de cœur de Tosca découvrant le traître assassinat de Mario Cavarodossi, le pointage géométrique des belcantistes comme de l’orchestre est irréprochable. Permettant de jouir, outre de solistes d’anthologie, de l’intelligence de la direction de cher Herbert sachant aussi bien « filigraner » un orchestre dont la munificence est à son apogée que lui bichonner un rôle au même titre que les acteurs, tout autant que bercer maternellement les sentiments d’iceux.

La rigueur et minutie de la lecture par la DS 003 campent fermement les artistes sur le sol - stable -, à leur place, possiblement en lissant un tant toi peu la sensibilité…

J’en profite au passage pour préciser que ce fort beau coffret est de ceux qui font regretter le vinyle : le livret (en anglais, soit) est d’une richesse extravagante, les gravures, les photos, les explications techniques des sessions d’enregistrement…

Allez, après une page de poésie, une page de euh… Moindre poésie :

Cerrone (si si !) III (Supernature) en 1977. Plus particulièrement les passages Sweet Drums et In the Smoke

Qu’est-ce que ça pousse avec la DS 003 !

La batterie plus étendue que les bras du « bûcheron » (1.72 m) déploie une envergure quasi réelle (oui, bon, sur un système à la hauteur) !

Ses dimensions, en dépit des effets abusifs de la production, tiennent la route par la lisibilité de placement des (très) nombreux fûts dans l’espace posés comme des piliers de béton soutenant une Babel idéalisée, et les balades artificielles, tournoyantes, des vagues de synthé ne révèlent pas le moindre creux temporel.

Quel sérieux !

Une fois de plus on est sidérés par l’aplomb de la proposition, le poids des toms basses par exemple, et tant pis si les frappes trapues, appuyées se manifestent solennellement au désavantage peut-être des chassés de poignets et de peaux ; de swing ?

Ou tant pis encore si le beat obstiné du disco sonne un rien synthétique, puisque, franchement, quelle importance face au panache général !

Il me semble avoir vécu plus de mystère dans In The Smoke, notamment le court passage très aérien et lumineux comme sortant des brumes ; néanmoins, on ne peut s’empêcher de supposer que l’application dont fait preuve la DS 003 peut tout simplement être plus juste.

En outre, n’oublions pas que DS 003 a des grandes sœurs. Il serait intéressant de savoir ce qu’elles apportent.

Scène sonore :

A condition d’accepter le prérequis de la prestance triomphante des musiciens :

DIAMs 61 ORANGE

 

 

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE :

La dynamique, on s’en doute, sait passer en quelques nanosecondes par toutes les étapes de la mutation d’un Doctor Jekyll freluquet cacochyme à un Mr Hyde plus effrayant qu’un foudroyage d’immeuble, et inversement, sans se laisser déborder, jamais en lâcher-prise.

Ce point est évidemment vérifiable sur tout passage où la dynamique est naturellement expansive, tel un Capriccio Espagnol (Rimski-Korsakov) pas des plus subtils ou « ibérique » mais spectaculaire proposé par Eduardo Mata et le Dallas SO en 1981 ; mais il est plus surprenant sur des galettes qui ne nous ont pas habitués à une dynamique foncièrement soulignée, ainsi le Cerrone déjà cité mais aussi tout simplement sur Houses of The Holly de Led Zeppelin (1973) où la production est certes méthodique mais la dynamique coincée dans un carcan de 3 dB comme beaucoup de disques rock de l’époque, sans doute calibrés pour les électrophones et les radios pas encore majoritairement FM.

La DS 003 semble remasteriser ce genre de disque en les dopant d’un éclat, un culturisme soudain qui, par expansion du bas-relief, dynamisent le rendu et ce d’autant que l’équilibre tonal musclé accentue le modelé.

Au point de rendre terne le retour à une cellule pourtant loin d’être paresseuse et d’ailleurs pourvue d’autres qualités.

On aborde ensuite les parties les plus aléatoires de chacun de nos tests, celles qui peuvent paraître les moins « objectives » ou en tout cas les plus difficiles à décrire ou partager.

John Jenkins, Kenny Burrell, Sonny Clarke, Paul Chambers et Dannie Richmond en 56 chez Blue Note déboulonnent une liberté musicale totale, joyeuse, inspirée et débridée, immortalisée par la DS 003… Libre, vigoureuse, oui, confinée toutefois dans un swing passablement mécanique, pas exactement balançant. On passera facilement outre ce bémol compte tenu de la solide existence physique des musiciens, mais c’est quand même une légère réticence dans la litanie de louanges.

Nouvel essai avec Sonny Meets Hawk (Sonny Rollins et Coleman Hawkins) (RCA 1963, géniale pochette de Paul K. Freman) où l’on regrette que Sonny Rollins, en faisant trop comme si souvent, entraîne son camarade dans le même excès démonstratif.

En revanche, les passages de Paul Bley (piano) sont un régal d’intelligence et de créativité. Pour tout dire - dans cette mayonnaise d’egos - : de fraîcheur.

Bon, avec le joujou du jour, ça pulse, on s’en doute. Et rend d’autant plus flagrante la flagornerie de Rollins, peu soulagée par le soupçon de groove escamoté par DS 003 qui aurait sans doute rendu service.

Tout barguignage à prendre avec des pincettes, car la rigueur de la cadence est loin d’être désagréable, bien sûr ; et surtout on sait que nombreux sont les hifistes qui ne sont que partiellement sensibles à ce paramètre où ils se satisfont amplement d’une syncope rythmique élémentaire.

Soit.

DIAMs 5 ORANGEs

DS 003 2

EXPRESSIVITÉ :

Il n’est pas rare que la notion de souplesse et rebondissement que nous attendions dans la rubrique précédente soit un indicateur partiel mais sérieux de l’expressivité.

On pourra rétorquer que nous nous sommes habitués à trop de déformations et de jolis mensonges, et, conséquemment (« du coup », si vous préférez l’abêtissement syntaxique générationnel), que c’est l’intransigeante DS 003 qui a raison.

Soit encore. A vous de juger.

De notre côté, nous sommes restés sur notre faim sur quelques aspects peu ou prou sérieux.

Avec Je Suis Seule ce Soir (et alors, moi aussi ; pas de quoi se vanter), Juliette Greco, comme on s’y attend, délace une grande élégance, un clin d’œil de malice, et ce alors que, cette fois encore, la matière du vinyle vient colorer le son par une sensation de matière creuse, sans dénaturer, heureusement, le plaisir que l’on prend à la belle délicatesse du vibrato ou aux ombres nées d’une gorge sensuelle. La restitution élude cependant le legato de certaines modulations sinueuses ou en montagnes russes abordées avec grâce par la grande dame, nous désynchronisant d’un rien de la pure magie.

Idem avec Serge Gainsbourg, l’Hôtel Particulier où on sait pouvoir attendre des petits coups de poignets d’Alan Parker plus agiles ou des glissements suaves de Dave Richmond plus ondoyants, ou encore des effets de frappe de Dougie Wright plus bigarrés.

C’est vrai aussi lors de l’échange final entre Leontyne Price et Giuseppe di Stefano et la confrontation (brève) entre Tosca et Pierro di Palma qui n’incarnent pas intégralement la poignante souffrance ou colère des protagonistes.

En fait, c’est un peu ça qui aurait pu faire de cette formidable cellule un chef d’œuvre : alors que la présence physique est indubitable, manque le pur lien organique avec l’humanité frémissante qui définit en partie l’expressivité chère à nos cœurs d’artishow…

DIAMs 4 ORANGE.2

 

 

PLAISIR SUBJECTIF :

Soit : des ostrogoths comme nous peuvent regretter une pincée de sel, une pointe de Romarin, une once de Paprika ; est-ce que ça en revient à bouder le plaisir d’entendre son système soudain devenu plus grand, plus engagé ou enragé que d’habitude ? Non, évidemment !

Je crois même que, pour beaucoup, cette voie impériale – celle de l’affirmation de soi - est incontournable !

Car si on peut parfois émettre une ou deux réserves en tant qu’analystes ou mélomanes pointilleux, il serait malhonnête de ne pas avouer qu’en repassant à un ensemble cellule/pré-phono déjà très qualitatif, certes un peu moins coûteux, on a l’impression que tout est devenu un peu fluet, un peu timide

Bouder le plaisir relèverait dès lors de la malhonnêteté intellectuelle :

DIAMs 61 ORANGE

 

 

RAPPORT QUALITÉ/PRIX :

La DS 003 décrite ici n’étant pas simplement une cellule mais un concept global, l’échelle de comparaison est évidemment gauchie.

Celui qui estimerait avoir acquis un préampli phono particulièrement valeureux ne comprendra pas forcément l’intérêt de tout remettre en cause.

Mais un audacieux ou un primo-acquérant visant un haut-de-gamme à part pour une investiture du vinyle débarrassée des syndromes du passé devra sérieusement se poser la question d’une cellule non pas langoureuse, mais victorieuse.

DIAMs 6 ORANGEs ?

 

 

Droit de réponse de l’importateur David Rio, Fusion Acoustic :

Le lancement de la marque DS Audio en France vers 2015 avec le modèle DSW1 dit « The Nightrider » (le cavalier de nuit) a été particulièrement difficile. Il était simultané au retour de la platine vinyle laser ELP dont la technologie numérique sans contact n’a STRICTEMENT rien à voir avec le système 100% analogique de DS Audio.  

Aussi, je suis très reconnaissant à l’équipe du Beau Son d’avoir pris le temps de découvrir la marque et son univers technique et de partager son expérience du set DS003 avec ses lecteurs.

 

DS 003 3

Banc ecoute