à l’oreille





Mastersound EVO 300B

la belle histoire

par LeBeauSon - Juillet 2021


Que ce soit pour ce qu’il représente de transmission d’un savoir-faire intemporel et indémodable, ou simplement au regard des délicieuses sensations qu’il provoque à l’écoute, le Mastersound Evo 300B est un très bon parti tant pour le mélomane que pour l’audiophile nostalgique.

Les faits sont là : le charme, le plaisir, l’histoire sont réunis dans cet appareil dont les performances musicales feront aisément oublier les prétendus meilleurs du monde au design trop parfait pour être honnête.  

Ne vous trompez pas de quête cependant : si vous cherchez un cogneur, ou un ampli qui pourrait soulever un porte-containers, passez votre chemin.

Si vous cherchez un confort délectable, une bienveillante délicatesse - jamais émolliente -, foncez !

 DIAMs 5 Rouges

 

 

Pour d’autres, ce sera :

DIAMs 61 rouges

NB : code couleur de nos diamants pour ce banc d’essai : Rose (de 6 500 à 12 000 €)

MasterSound300b 7

On savait l’Angleterre, les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, patries d’audiophiles. Eh bien décidément, l’Italie est aussi un grand pays de la haute-fidélité et de mélomanes chanceux. Par un concours de circonstances, nous additionnons depuis plusieurs mois des tests de réalisations transalpines de haute qualité. Or le Mastersound Evo 300B se place parmi les plus enthousiasmants que nous ayons eus entre les oreilles.

L’historique de la marque commence… euh… pardon : le storytelling de la marque commence dans les années 1950. Cesare Sanavio est diplômé en électronique, auteur d’une thèse sur les transformateurs de sortie dans les amplificateurs à tubes. Il parcourt avec sa famille une part de l’Amérique latine exerçant ses compétences au service de la radio et de la télévision alors en plein essor. Au cours de ces années, Luciano, l’aîné de ses fils se fait la main sur ses premiers amplificateurs à lampes. Oserai-je parler de virus ?

On a les jouets qu’on peut, tout le monde n’est pas fan de Fortnite ou de Pokemon…

Heureusement.

De retour en Italie avec sa famille, Cesare travaille pendant plusieurs années pour diverses entreprises de la hifi des pionniers. Après cinquante ans d'expérience dans la conception et la construction de systèmes audio, il décide de fonder sa propre société avec ses fils : Mastersound

Le premier amplificateur «2-11 A», salué unanimement par les professionnels, trouve rapidement son public et permet à l'entreprise de devenir une référence.

Après la disparition de papa, Lorenzo et Luciano poursuivent les travaux de l’entreprise. En 2015, la nouvelle société Mastersound SRL, aux ambitions plus vastes, voit le jour, renforcée par les apports d’investisseurs internationaux, et s’installe dans la province de Vicence, à Arcugnano.

Luciano Sanavio, directeur de production, insuffle la passion de son père à ses collaborateurs pendant que Lorenzo, directeur administratif, fait connaître les productions de la marque à travers le monde.

Mastersound SRL produit des amplificateurs à tubes en conservant les traditions d’extrême qualité de l’artisanat « fait main » à l’italienne. 

Mouais, avec ça, on est bien avancés.

Revenons à l’objet de notre test : l’amplificateur intégré Evo 300B

De quoi s’agit-il ?

D’un appareil plusieurs fois bonifié au fil des années, descendant d’un modèle nommé PSE de deux générations son ancêtre. Aucune fonction originale, rien d’hyper technologique, pas de schéma novateur. Ce modèle met à l’honneur une lampe légendaire, la 300B vénérée par de nombreux initiés.

Des brevets ? J’en doute.

Pensé pour ne rien perdre des qualités du tube mythique, l’appareil s’affranchit de la contre-réaction évitant de ronger à l’écoute moult infimes et précieux nuances et détails pour insuffler du merveilleux à la moindre note. 

Sachant que tous les fabricants d’amplificateurs utilisant le 300B (soit… 3257 dans le monde ?) affirment la même chose, partageant le plus souvent un même échec, il va nous en falloir un peu plus pour nous convaincre.


L’amplificateur en classe A (de bout en bout), est un montage en parallèle, employant 2 triodes 300B par canal. Oui, ça fait 4 tubes 300B. Vous avez triché en regardant sur les images, je le sais. On garde ainsi les qualités d’un montage dit Single Ended (par opposition à push-pull ; faudra que le grognon de service vous écrive un article là-dessus) en multipliant la puissance par deux. La contrainte est que les tubes doivent être scrupuleusement appariés.

L’étage d’entrée et gain est confié à deux doubles-triodes ECC82.

L’étage driver emploie sur chaque canal une double-triode 6SN7.

J’imagine le jour où je croiserai un martien : l’incompréhension sera du même ordre.


Pour garantir une bande passante plus étendue et un couplage plus performant, Mastersound a amélioré ses transformateurs de sortie, multipliant les couches de bobinages en cuivre pur.


Cet amplificateur intégré est donné pour une bande passante couvrant de : 8 Hz à 40 kHz – 0 dB. C’est, euh, impressionnant… et ça suppose des transformateurs de sortie performants.

Sa puissance maximale est de 2 x 24 W. Pour un parallèle de 300B, c’est plutôt élevé, les tubes ne doivent pas chômer.

L’impédance d’entrée est de 50 kOhms (quelle surprise !)

Les impédances de sortie sont au choix 4 ou 8 ohms. 

L’Evo 300B comptabilise trois entrées ligne RCA ainsi qu’une entrée XLR et une entrée directe au choix RCA ou XLR. Entrées qu’il faut choisir manuellement en façade avec le sélecteur à gauche. Basique !

On règle le volume avec le potentiomètre à droite, ou à l’aide d’une télécommande d’un autre âge dévolue à cette stricte fonction, semblant sortie d’un film de science-fiction des années 50. 

Les dimensions de l’amplificateur sont : 45 cm en largeur x 27 en hauteur x 43 en profondeur.

MasterSound300b 4

Et enfin son poids est de … ppfffiou : 34 kg ! 

C’est sur ce point désagréable que j’ai fait sa connaissance. L’installer sous mes projecteurs, puis au cœur de nos installations, m’a laissé quelques douloureux souvenirs. En fait chaque manœuvre est délicate, car bébé sumo penche lourdement en arrière, côté transfos. 

Vérifiez, avant de le porter à bout de bras, que votre meuble accepte de recevoir l’atterrissage du poids d’une mes ados.

Mais une fois branché, c’est sûrement lui qui vous transportera !

On trouve sur le marché une quantité non négligeable de tubes 300B, de fabrication actuelle, ancienne, NOS* ou pas. Si les débats concernant les uns face aux autres ne sont pas le sujet du jour, il faut admettre que le choix des tubes transforme la signature sonore et l’addition également. Ne tentez rien à l’aveugle… je rectifie : sans écouter ! Faites-vous conseiller, vous pourriez passer à côté de merveilles. 

Nous avons profité de tubes EAT, réputés pour leur qualité de timbres, le respect de l’équilibre tonal, la rapidité et la transparence.

Ce ne sont pas les tubes d’origine, à savoir des Electro-Harmonix, que nous avons aussi voulu essayer et reçus un peu plus tard, alors que nous avions déjà bien avancé dans notre banc d’essai.

D’où ce qui peut sembler une rédaction un peu désordonnée.

Pour une fois que j’ai une excuse.

Le prix des diverses combinaisons ?

Nous sommes autour de 8 500 euros avec les 4 tubes 300 B Electro-Harmonix montés d’origine.
Dans le cas d’une commande avec des KR (non testés), le surcoût est de 1 260 €.

Et en cas de commande avec les EAT, la plus-value est de 2 000 €, une véritable affaire puisque achetés à part, ces mêmes tubes coutent 4 000 €. Les quatre.

On peut se demander : pourquoi pas de propositions de tubes supérieurs en étage d’entrée et driver quand on sait l’importance qu’ils revêtent ? C’est vrai ça, pourquoi ? Voyez avec votre revendeur, il a les réponses. Ou sa compétence est limitée.

Oui, le prix de la passion est souvent déraisonnable.


Et puis, … vous ne le trouvez pas esthétiquement sympathique ce machin ?

Moi oui. Je n’ai pas dit beau ; sympathique.

Matériel de test : Lumin U1 Mini, Eera Andante II, Lector CDP 603, Pro-Ject 2 Xperience SB-DC, MC Hana SL, Aurorasound Vida Prima, Mulidine Cadence ++, Davis Acoustics Krypton 6, PMC Twenty5.24i, câblage Van Den Hul, Absolue Créations, Neodio, MudrAkustik.

D’entrée, efflorescence des timbres, foisonnement de détails et ampleur de la scène sonore surprennent.

Détaillons …

 

MasterSound300b 6

RICHESSE DES TIMBRES, ÉQUILIBRE TONAL :

Jakob Bro, Arve Henriksen, Jorge Rossy sur Uma Elmo, sorti sur le label ECM en février 2021, façonnent une musique énigmatiquement inspirante, des mélodies suspendues par le jeu de batterie aérien de Jorge Rossy.

Vous l’avez compris, encore un disque que l’on ne classera pas parmi les plus furieux. Et comme beaucoup de jazz ECM venu du froid, il est parfois possible de s’ennuyer, surtout si le moment ne s’y prête pas. 

Première plage de l’album, premiers filets d’air de la trompette. Le batteur s’élance doucement.

Sous l’éclairage finement dosé de l’Evo 300B, les impacts gorgés de matières retranscrivent la nature fidèle des supports, peaux ou métaux. Une savante posologie d’épaisseur donne aux timbres un surcroit de réalité. La trompette d’Arve Henriksen semble planer au-dessus des ambiances installées par ses deux compères. 


Les instruments respirent et à aucun moment la transcription, très charnelle, ne souffre d’un embonpoint gargantuesque.

La proposition insensiblement mate est opportune. L’aigu aérien, précis et délicat dessine les contours, apporte la légèreté et l’acuité attendues, sans brillance artificielle. Le médium, d’une florissante fertilité, se fond naturellement et sans rupture dans le registre grave au sens large. Les timbres in extenso donnent le sentiment d’une restitution sans la moindre perte d’information ou disharmonie, incarnant les musiciens dans un gabarit physique hautement appréciable.

Et ce, sur l’ensemble du spectre : matières, euphonie des instruments sont nettes, admirablement variées, entières.

L’équilibre global ne souffre d’aucune irrégularité majeure. Tout juste remarquera-t-on une possible coupure avant l’infra-grave, nous préservant de toute exagération souvent attribuée aux « mauvais amplis à tubes ». Pour être franc, on détecte également un petit déficit d’énergie ou de fermeté. Est-ce lié à un bas grave contenu, ou la conséquence du copieux épanouissement des teintes et substances dans le médium ? Difficile à dire.

Bien sûr, bon nombre de ces « artifices » sont aussi caractéristiques du tube 300B que bon nombre de mélomanes n’échangeraient pour rien au monde.

Toutes constatations faites avec les tubes EAT.

Pendant que je gribouille mes lignes, je réalise que l’intégralité de l’album Uma Elmo s’est écoulée sans que j’éprouve d’ennui. Là aussi je mesure les bienfaits de l’intégré italien. Il réussit à capter l’attention sur des tempos lents par une charnelle exploration des sonorités.

Lorsque l’on chausse des tubes 300B moins ambitieux, en l’occurrence les Electro Harmonix d’origine, la sublime distinction vire à une nonchalante noblesse, une forme de dandysme négligeant. L’air entre les instruments, ainsi que d’infimes nuances dans l’aigu, sont en retrait. Le grave, bien présent, soit, s’avère moins joliment structuré, plus engoncé dans les enceintes. Le Mastersound en mode Electro Harmonix préserve certes une lecture riche et magnifiquement variée du médium, mais moins fouillée, moins réactive et surtout parcoure plus superficiellement les deux extrémités du spectre en arrondissant les courbes.

La voix de Sophie Hunger sur sa reprise de Noir Désir : le vent nous portera, fait preuve d’une abondance harmonique que je n’avais pas souvent entendue, au point de subodorer que c’est probablement un peu trop.

Retour à la rigueur plus appropriée des EAT pour un petit tour par l’album Berio To Sing, où le chœur Les Cris De Paris, conduit par Geoffroy Jourdain, interprète des compositions lunaires de Luciano Berio, ainsi qu’un titre des Beatles. Un disque parfois effrayant, souvent déroutant, mais complètement festif ici.

Le disque, l’auteur, explorent une large variété d’approches du chant parsemées de la rare intervention d’instruments, un piano, un violon, une flûte… très peu. La présence appuyée des voix presque surnaturelles sur les premières pistes participe idéalement à la narration des compositions, d’autant que distinguer la tessiture de chacun des participants est particulièrement aisé, surexposée par l’Evo 300B, grâce auquel tout n’est que finesse, pigments et textures.

Comme tirée de contes, une délicieuse poésie s’écoule des mélodies décalées. Le Mastersound permet une excursion fine et suave dans l’œuvre là où d’autres nous ont incités à zapper.

Disque paru chez Ondine en avril 2021, l’Orchestre National Basque interprète des pièces orchestrales de Maurice Ravel, sous la direction du jeune chef américain Robert Trevino.


Les paysages sonores tourmentés, angoissés ou mystérieux approchent les partitions d’une évidente forme d’exaltation, voire d’expressionnisme.

L’Orchestre National Basque et le Mastersound s’entendent à merveille pour mettre en évidence le travail sur les inflexions et le génie orchestral du compositeur.

Des arrière-plans magnifiquement habités étoffent les tableaux. Au risque de me répéter, l’épaisseur et l’intégrité des matières et des teintes discriminent soigneusement les pupitres, qui jaillissent parfois tonitruants, ajoutant une dimension spectaculaire à quelques mémorables passages tel le final, Feria, de La Rapsodie Espagnole.

Une barque sur l’Océan laisse entrevoir les oscillations, la fragilité de l’embarcation sur l’eau. L’Evo 300B sait captiver. Le charme de la 300B, telles les sirènes appâtant (zappatant ?) Ulysse et ses sbires semblent plus proches que d’habitude. Or, nous n’avons pas tous Circé dans la poche.

Complétant le questionnement, suit la pièce que je n’écoute plus depuis longtemps : le Boléro, commandée au compositeur par son amie Ida Rubinstein, composition devenue un tel tube (euh…) qu’elle en a vampirisé l’œuvre ô combien imaginative de notre basque bien aimé. Par l’Evo 300 B, Le Boléro boucle en conclusion jamais lassante les vertus colorimétriques d’un impérissable chef d’œuvre, permettant d’oublier que, une fois de plus, le tempo lent, mécanique voulu par le compositeur (et il suffit pour s’en convaincre d’écouter la version soi-disant dirigée par Ravel lui-même, revendiquée par Albert Wolff alors qu’en vérité les répétitions ont été menées par Pedro de Freitas Branco puisque Ravel ne savait pas diriger un orchestre) n’est pas respecté, dénaturant la profondeur métaphysique de cette plongée dans les abysses…

 

Richesse des timbres 

On ne sait pas.

DIAMs 61 rouges

 

 

selon certains d’entre nous

DIAMs 5 Rouges

 

 

pour d’autres estimant narcissiquement que l’avalanche fruitée est factice.

 

Équilibre tonal

DIAMs 4 ROUGEs

 

 

ou

DIAMs 5 Rouges

 

pour les mêmes raisons

 

MasterSound300b 2

SCÈNE SONORE :

Ample, précise, structurée, il m’est difficile de trouver un défaut rédhibitoire. Le plaisir du Ravel que propose le Mastersound suffirait à s’arrêter là. 

Or, c’est d’autant plus évident sur des petites formations de jazz, ou de soul comme le célèbre titre remastérisé de Roberta Flack : Killing me softly with his song. L’incarnation de la star, magnifiée par la « magie » de la 300 B, l’extrait de l’entourage de ses comparses, très espacés les uns des autres, débordant largement des limites des enceintes. Les voix des choristes en arrière-plan flottent vaporeusement sur la gauche (effet controuvé au mixage pour dissocier les voix de chœur de la vedette).

Les fins de notes, notamment des instruments de percussion, s’évanouissent lentement, comme en apesanteur.

Sur l’album de folk indé du délectable Pale Horse Rider de Cory Hanson, on perçoit à nouveau une large scène sonore, très ouverte. Il y a quelque chose de Jonathan Wilson dans les ambiances joliment « Rock Indé West Coast »… pas immensément original, mais bien fait.

On apprécie de pouvoir profiter pleinement des particularités de chaque musicien. Très en chair, leur présence paraît sensiblement plus grande que nature. Une estimable densité d’ensemble renforce la perception de vie dans la pièce d’écoute.

Dernier écart, pour exprimer la scène sonore du Mastersound, je passe par le jazz en mode joyeuse fanfare de la formation Swing Bones et Nicolas Gardel sur son album La part des Anges

La résolution « artistique » de l’Evo 300B dispose avec assurance une éclatante ligne de front conquérante des cuivres, trombones et trompette. Les premiers instants introduits par le batteur sur le titre Rhum a Ranger positionne clairement l’intervenant, ainsi que ses collègues contrebassiste, pianiste, en arrière-plan dans des dimensions vraisemblables, certainement pas maigres, ni simplifiées. 

Toujours jazz, à nouveau en compagnie du guitariste Jakob Bro et de ses deux compères sur l’album Uma Elmo, où le Mastersound distille un spectacle très en relief, presque hypnotique. Les effets du batteur s’exposent sur la largeur de l’espace, pendant que la trompette d’Arve - en survol - prend par instant des airs de Ben WebsterJakob donne, quant à lui, le sentiment de s’être installé en retrait comme pour mieux respecter le talent de ses camarades. 

Avec l’Evo 300B amplifié par les tubes EAT, les musiciens atteignent une envergure physique frôlant l’opulence. La mise en scène est à la fois large et échelonnée en profondeur. Orchestre symphonique ou formation de jazz, l’air autour des musiciens délimite des distances à même de les individualiser au-delà de leurs sonorités.


L’enthousiasme est moindre en installant les Electro Harmonix : spectacle moins exaltant, moins « respirant ». De même la profondeur est plus étriquée là où la largeur paraît sans limite.

Scène sonore : Spectacle !

DIAMs 6 rouges
avec EAT

DIAMs 4 ROUGEs
avec Electro-Harmonix

 

RÉALISME DES DÉTAILS :

Quels que soient les styles et les disques essayés, l’Evo 300 fourmille de détails sans disséquer le message au point d’en altérer l’intégrité ou la véracité.

 

On ne perçoit pas les effets de jeu des musiciens par des trous de serrure, addition d’effets zoom, pas plus que par une forme de définition exaltée et donc faussée mais par un sens équilibré et cohérent de la résolution, et ce en dépit de fronts d’onde pas toujours tendus.

Pas d’excès de zèle en somme : on s’installe facilement en spectateur d’un concert à la maison. 

The Bad Plus sur l’album For All I Care, propose une reprise du titre Confortably Numb (Pink Floyd) introduite par la voix de Wendy Lewis, mais aussi la contrebasse saisissante de Reid Anderson à droite de la scène.

Les cordes, d’une élasticité remarquable, claquent (oxymore ?) avec réalisme. À la fin du titre, on s’amuse à observer en arrière-plan le pianiste Ethan Iverson se perdre dans l’enchaînement de phrases répétitives.


Sur un autre opus plus consensuel du même trio, Never Stop II, les frappes du batteur sont immédiatement accaparantes par la précision des effets de matière. Le piano n’est pas en reste, bien charpenté, même s’il ressemble parfois plus à un voluptueux clavier électrique qu’à un Steinway. 

Sur Homages de Benjamin Grosvenor paru chez Decca en 2016, le piano dépasse le plaisir de la note tant les variations harmoniques et de jeu de l’artiste sont intelligibles. L’arrangement par Busoni de la Chaconne de la Partita pour Violin No. 2 en D mineur installe le lourd Steinway en relief au cœur de la pièce. Benjamin Grosvenor distille une superbe maestria. Toutes les finesses techniques de l’artiste sont livrées avec limpidité, dosées adroitement par l’amplificateur intégré Mastersound qui nous invite à nous concentrer pendant l'intégralité du récital.

De manière générale, voix humaines et cuivres profitent particulièrement du talent de l’intégré italien par la sensation d’une fouille au corps des matières, complaisante, toutefois, sujettes à caution car plus « vraies » que nature, autrement dit, faussement naturelles. Mais si séductrices, plaisantes, confortables que le doute est permis.

En effet, alors que les peaux, les percussions, comme un glockenspiel par exemple, sont magnifiquement crédibles grâce à une justesse de textures et une large variété de nuances sur les longueurs de note, d’autres instruments manquent d’un soupçon de vigueur, de rapidité, d’impact.

Le piano paraît moins dominateur qu’on ne le connaît, la guitare moins acérée, qui certes profite d’une bonhommie esthétique pas désagréable mais contrainte à moins d’aisance, empêchée de pleinement respirer.

Sur le dernier Raoul VignalYears in Marble, l’Evo 300B laisse deviner le touché suave du guitariste, tandis que les soyeuses tensions des cordes sont partiellement « mangées ».

Envergure et déploiement coloriste compensent allégrement la relative paresse sur les contours de divers instruments, pour autant on est ici dans une tradition du tube qui ne plaira pas à tous.

Les tubes Electro Harmonix accentuent l’onctuosité essentiellement charnelle de l’amplificateur.

Avec constance, la palette graphique, la densité et un avatar de matérialisation sont pétris en épaisseur. La perception « pâte à modeler » est plus marquée sur des grandes masses orchestrales. Parallèlement et presque contradictoirement, à l’écoute de formations rock, orchestres de chambre ou formations de jazz plus ramassées, les instruments s’épaississent en avantageuse présence, même sil semble que la dynamique générale soit un soupçon plus tassée.


L’équilibre subjectif (pouah, quel vilain mot) entre la retenue évoquée et le bénéfice d’un confort d’oreiller en duvet, sera possiblement décisif au moment de choisir vos tubes.

DIAMs 5 Rouges

 

 

DIAMs 4 ROUGEs

 

 

selon les tubes 300B… et l’environnement choisi.

MasterSound300b 3

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE :

Le groupe de « Surf Pop » des frenchies Ponta Preta sur leur album Tits Up paru chez Surf Records, rafraîchissant comme on l’aime, propose une musique enjouée qui incite à une bougeotte optimiste. Un disque « easy » qui, par la légèreté et l’élégance des mélodies qu’il déroule, pourrait facilement servir de BO à vos road trips estivaux, fenêtres ouvertes, cheveux dans le vent. L’Evo 300B accompagne avec rigueur et souplesse les effets des Lyonnais et, je pense, sauve de la facilité certaines compositions en mettant en valeur le travail de la production. L’intégré à lampes transalpin donne plaisir à se laisser gagner par les insouciantes facéties. Il n’impose rien, n’envoûte pas, mais permet le swing lorsqu’il est réussi par les artistes. Le swing étant parfois comme le cappuccino : raté.


Le dernier album de St Vincent - Daddy’s Home, plutôt teinté funk, l’intelligence de l’artiste en prime, est un bon tremplin pour permettre à l’Evo 300B d’exprimer ses capacités d’ensorceleur. Oh, il y a du Prince dans les délires des arrangements des bidouilleurs fous (Annie Clark et Jack Antonoff) sur cet album à écouter impérativement ! Car pour une fois les guitares de sa Majesté St Vincent sonnent comme des guitares, et son superbe chorus sur la 4ème piste relève de Prince, pas de Beck ou autre quelconque Guitar Hero. Les influences tendent vers Bowie et même, dans le phrasé sur quelques morceaux, vers Liesa van der Aa de Easy Alice, Stevie Wonder, et Sheena Easton (ou Sylvie Vartan pour la même chanson ! (l'amour est comme une cigarette)) !

Trop drôle non ? Si ! Parce qu’elle ne trahit jamais ce qu’elle est : une artiste libre qui, même lorsqu’elle rend hommage aux musiques de son père ou qui lui rappellent son enfance avec ce père dont elle a longtemps été privée par la barrière de la prison, impose une autorité esthétique sans le moindre équivalent, quand bien même j’ai lu quelque part un article qui considérait ce nouvel album inférieur à une forme d’approche comparable d’une musicienne que par ailleurs j’aime beaucoup : Heavy Light de U.S Girl.

Quelle totale incompréhension !

Dans un cas, U.S Girl, on parle de récupération ou à la rigueur de réappropriation. Dans l’autre, St Vincent, on parle de métamorphose ou plus précisément : d’Imago !

La malice permanente, l'ultra précision des idées millimétrées, une queue de réverb sur une guitare introduisant l'harmonisation des chœurs et ou du chant, etc. - qui n'appartient qu'à Annie Clark -, les performances vocales planquées, les jeux subtils du groove permanent, chaloupant, les clins d'œil et la récupération totalement réappropriée qui dépasse la création, que dire encore ?

 

Et bien que le Mastersound, s’il ne rate pas la marche, glisse un peu dessus, patine sur quelques idées, raccourcit les élans. Un petit manque de mordant, qui n’est pas vraiment préjudiciable sur les compos d’Annie Clark inspirées – vous l’aurez compris - des productions US des années 70. L’exploration souple des florissantes atmosphères que livre l’appareil compense probablement le manque d’engagement à suivre les déhanchés burlesques et l’hyper-créativité de la drôle de star.

Ou pas.

Une fois de plus, on est bel et bien dans l’ambivalence de la « Magie » de la 300B, qui, comme l’hypnose, ne fonctionne pas sur tous les cobayes.

Par prudence, j’avoue ne pas être convaincu d’avoir su trouver la parfaite association câbles, enceintes, à même de complètement libérer l’amplificateur intégré. Acceptant que pour un choix aussi assumé que le suppose ce genre d’appareil – en ayant en tête que l’Evo 300B s’affranchit de nombreuses limites du genre – il faut accepter un précepte qui n’enchante guère mes collègues : la relativité du mariage. En Hifi.

J’ajoute que, en revenant aux tubes EH, j’ai constaté un tassement général de l’entrain. Tel un danseur qui perdrait de sa grâce, les gestes deviennent, par comparaison, mécaniques, empesés, moins aériens. En toute logique, la note varie en fonction des choix de l’optimisation. 

Swing, vitalité, dynamique :

DIAMs 5 Rouges

 

 

DIAMs 4 ROUGEs

 

 

 

EXPRESSIVITÉ :

Spectateur aux premières loges : c’est sans aucun doute la place à laquelle cherche à vous inviter le Mastersound.

Pourtant, ce carré VIP n’octroie pas à coup sûr l’intimité avec les passeurs d’émotion. Je n’évoque pas un effet loupe qui pourrait donner l’illusion d’un supplément d’indiscrétion, j’explique ne pas avoir toujours été pleinement emporté par à la dramaturgie des récits. 

L’Evo 300B n’est pas dénué d’expressivité, évidemment ; il se place même parmi les bons élèves. 

Ainsi ai-je été complètement happé par The Portrait of a Pregnant Bumblebee (du Lada Obradovic Project), paru chez Neuklang en 2018. Réunis autour de la batteuse pour interpréter ses compositions, l’album regroupe les musiciens Miha Koren à la basse, Maxime Berton au saxophone soprano, David Tixier au piano, Matthias Legner au marimba et vibraphone… 

Tous semblent particulièrement concentrés et appliqués pour transmettre une subtile énergie. L’Evo 300B ajoute une hyperbole de sensualité à l’inventivité du jeu de Matthias Legner, aux envolées de Maxime Berton et à l’effervescence que communique Lada au groupe ; chouette moment où les potions « décoratives » de l’amplificateur griment une production un peu émaciée.

Alors que, quelques minutes plus tard, la fameuse version de l’Adagio Assai du Concerto pour Piano en sol majeur de Maurice Ravel – 1967, Martha Argerich à côté de son complice Claudio Abbado tenant les rênes du Philharmonique de Berlin -, me laisse ici (spectateur averti ?), un peu en retrait, la fluidité et la beauté prenant le pas sur des finesses piquantes du dialogue entre les deux immenses musiciens.

J’ai pleinement apprécié, les Valses Poeticos de Granados sous les doigts de Benjamin Grosvenor sur son recueil Dancessans être envahi d’émotion

Comme je l’ai écrit plus haut, j’ai pu savourer les modelés du piano, tout comme le talent de l’artiste à exposer un déroulement narratif d’une imparable clarté. Telle perception laisse deviner la somme de répétitions et le travail minutieux du virtuose pour atteindre « cette évidente facilité ». 

Je suppose que l’Evo 300B a si admirablement attiré mon admiration vers la prouesse pianistique que je n’ai pas réussi à lâcher prise…  Mais peut-être aussi que la magie n’opère pas tout à fait assez sous la gourmande pâte sonore… Car, je n’ai pas frémi.

Expressivité : À chacun de vérifier. 

DIAMs 5 Rouges

 

 

 

PLAISIR SUBJECTIF :

Il y a quelque chose d’une Ferrari Dino dans cet amplificateur intégré à lampes 300B. 

Le charme d’un objet un peu désuet, qui n’aura rien perdu de son sourire, de son mordant, de son attractivité redoutable. 

… Contact. Et aussitôt le son du moteur d’un autre temps, le cockpit un rien suranné, le levier de vitesse minimaliste plongeant dans sa grille, infusent aux anachronismes un inimitable caractère si attachant.

En fait, on l’aime cette spartiate et improbable télécommande en bois à deux touches, l’une pour monter le volume, l’autre pour le baisser. On adhère à ce simpliste sélecteur d’entrées. 

Et les quatre grosses lampes rougeoyantes à basse lumière en soirée ont quelque chose du 6 cylindres rugissant de la Ferrrrrrariii. Dino.

Qui n’est pas tout à fait une Ferrari…

Que ce soit pour ce qu’il représente de transmission d’un savoir-faire intemporel et indémodable, ou simplement au regard des sensations qu’il provoque à l’écoute, l’appareil est un bon parti tant pour le mélomane que l’audiophile passionné.

Les faits sont là. Le charme, le plaisir, l’histoire sont réunis dans cet appareil dont les performances musicales feront aisément oublier les prétendus meilleurs du monde au design trop parfait pour être honnête.  

Ne vous trompez pas de quête cependant : si vous cherchez un cogneur, ou un ampli qui pourrait soulever un porte-containers, passez votre chemin.

Si vous cherchez un confort gouleyant, une bienveillante douceur, foncez !

Pour le plaisir !

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

 

RAPPORT QUALITÉ/PRIX :

 

Un chapitre pas simple puisqu’on doit mesurer la part de l’intégré en lui-même et de sa versatilité en fonction des tubes de puissance.

Le Mastersound Evo 300B est une porte d’entrée très réussie dans le monde « féérique » de la mythique 300B. Relativement puissant par le montage en parallèle, révélant la plupart des afféteries romantiques de Palais des Mille et Une Nuits que l’immense majorité des dingues du 300B vénèrent, il est assez probable que, à l’exception de quelques chinoiseries d’opérette – par opposition aux productions chinoises dignes – l’appareil testé ce jour relève de l’exception.

Et ses vertus, totalement pieds et poings liés au choix de la « nature » du tube final, sont inhérentes au paradigme de « la 300B ».

En conclusion, si l’on isole l’appareil et ce qu’il permet d’atteindre, incluant le fantasme d’audiophiles pétris de nostalgie, nous ne pouvons (cette décision est un consensus) que lui attribuer la meilleure note :

DIAMs 6 ROUGEs

 

 

PERCEPTION D’ENSEMBLE :

 

Moi aussi je rêve d’une Ferrari Dino dans mon salon.

La Ferrari proposée par Mastersound est comme la Dino en son temps : pas si déraisonnable.

Divertissement exclusif, oui reconnaissons-le, compte tenu du prix de l’ensemble avec 4 tubes 300B appairés.

Mais si les éléments qui l’entourent sont à la fois choisis pour lui et à son niveau, coût et parfois fragilité des 300B pris en compte, un réel envoûtement passionnel est à la clé. 

Considérant sa puissance modérée, préférez-lui des enceintes de rendement élevé à très élevé. 

Par exemple, l’association avec nos joyeuses Cadences « ++ » nous a enchantés.

Elles ne seront pas les seules à savoir danser en préservant bonne figure et dignité, mais attention : l’Evo 300B n’est pas de toutes les fêtes.

Choyez son environnement, et le Mastersound Evo 300B, digne d’un véritable épicurien, n’aura aucun mal à exposer ses charmes.

EVO 300B : j’adhère.

 

DIAMs 5 Rouges

 

à

DIAMs 61 rouges

 

 

selon la patience ou le savoir-faire du magasin qui vous accompagnera dans cette quête.


* NOS ??? New Old Stock. Ouais, désolé les « décolletés du je sais tout », mais notre verbiage codé n’a pas de sens pour les amateurs de musique qui découvrent votre monde.

NOS désigne des tubes anciens, fabriqués à la grande époque, jamais utilisés.

Meilleurs ? Oh là …

Plus résistants ? Souvent, oui. Référez-vous à :

https://www.lebeauson.fr/guide/174-vintage-vs-modernite-c-etait-mieux-avant-5

 

MasterSound300b 5MasterSound300b 1

Banc ecoute