à l’oreille





Nouveau M2Tech Young Mk IV + Crosby

par LeBeauSon - Mai 2021


Perception d’ensemble

Les M2Tech constituent plus qu’une alternative : un véritable parti pris pour peu que la musique soit votre priorité sans trop de questionnement ou quête d’intériorité métaphysique.

C’est un dosage fin et apaisant entre les registres qui équilibre habilement harmonie spectrale et richesse des timbres, sans excès ou exubérance. Tous deux imposent avec maestria une salle de spectacle joliment proportionnée, à défaut d’en marquer la personnalité.

L’espace dessiné par le tandem fait complètement oublier la taille des appareils.

DIAMs 5 Bleu 1 gris

Code couleur de nos diamants pour ce test : Bleu (de 1 600 à 3 200 €).

 

Suite, (ou début, tout dépend dans quel ordre vous les lisez), du banc d’essai d’un ensemble Rockstars de M2Tech, composé pour ce test de l’ampli stéréo Crosby associé au convertisseur/préampli Young MkIV.

En parallèle, vous pouvez lire notre test du DAC/préampli Young MkIV, associé par intermittence à l’alimentation optionnelle Van Der Graaf II.

Young + Crosby (et les autres éléments de la gamme) créent un bel ensemble, de taille mesurée et d’un design sobre pour s’intégrer dans un intérieur citadin.

Le Young offre énormément de possibilités d’utilisation : ampli casque à côté d’un ordinateur ou au cœur d’une chaîne classique. Nous allons de ce pas (?) vérifier ce que le tandem a dans les tripes.

L’amplificateur de puissance stéréo en classe D Crosby est donné pour une puissance de 2 X 60 watts sous 8 Ohms et de 2 X 110 watts sous 4 Ohms. De quoi bouger du monde, quand même.

Côté connectiques, il propose les classiques entrées stéréo RCA, mais aussi des entrées symétriques XLR, les borniers de sortie HP et deux entrées Trigger pour un allumage simultané des divers appareils de la gamme, comme le Young en toute logique. 

M2Tech YoungMKIVCrosby BasseDef 2

Pas de mise sous tension en façade, un switch à l’arrière de l’appareil s’en charge. Une diode blanche en façade signale la mise sous tension de l’appareil. 

Si le distributeur de la marque italienne en France nous a confié quatre des bébés de la gamme M2Tech Rockstars, c’est évidemment dans l’intention de nous en faire mesurer leur éloquence propre comme au sein d’un ensemble complet. Alors nous avons pris le temps de jouer avec les diverses combinaisons, avec ou sans l’alimentation optionnelle, sur l’entrée analogique en utilisant le préampli Phono Nash, ou le convertisseur via l’USB avec un lecteur réseau, par le Bluetooth avec un smartphone, ou pour sonoriser un film… On a, je crois, tout essayé des possibilités de ces éléments. Or, c’est long d’en faire le tour.

Pour rappel :

Young MkIV :

1 entrée S/PDIF coaxiale (RCA)

1 entrée Optique (Toslink)

1 Port USB 2.0 high speed

1 entrée AES/EBU (XLR)   

1 I2S format HDMI

+ le Bluetooth, compatible aptX.

1 seule entrée analogique RCA stéréo. Mais le préampli phono Nash propose 4 entrées analogiques supplémentaires 

(dont 1 pour platine vinyle dotée d’une cellule MM et une autre pour cellule MC).

 M2Tech YoungMKIVVDGraaf BasseDef 3 copie

Le prix de l’ensemble :

Le Convertisseur/Préampli/ampli casque Young MkIV : environ 2 000 €

L’ampli stéréo Crosby : environ 1 100 €

Le préampli phono Nash : environ 1 600 €

L’alimentation Van Der Graaf II pour booster simultanément Young et/ou Nash : environ 1 100 € 

 

C’est un budget, soit.

Mais qui reste encore accessible pour qui souhaite un ensemble polyvalent, que l’on peut se constituer par étapes, qui plus est. La proposition M2Tech doit donc être considérée avec sérieux dans cette tranche de prix. 

Lors du test préalable des Young MkIV et Van der Graaf, j’avais été conquis par les qualités du convertisseur / ampli casque lors d’écoutes associées à mon ordinateur via Audirvana et Qobuz. 

M2Tech YoungMKIVCrosby BasseDef 3
 

Nous écoutons cette fois le tandem : préampli et ampli dans des conditions d’écoute plus habituelles :

Sources :

Lumin U1 Mini, 

Lecteur CD Synthesis 14DC+

Enceintes :

Mulidine Cadence « ++ »

Fyne Audio 501 SP

Davis Acoustic Krypton 6

 

Câblage :

Absolue Créations

Par souci de clarté, le Young MkIV est utilisé ici sans l’alimentation Van der Graaf, sachant que l’apport de celle-ci est expliqué dans l’article concernant le Young seul.

 

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL :

Alors que ce n’est pas ma tasse de thé, l’album Chemtrails Over the Country Club de la figure pop Lana Del Rey, pendant la rédaction de ces lignes, a glissé dans sa totalité sans le moindre ennui. J’ai dérapé, je l’avoue…

Les volutes vocales de la dame sont retranscrites avec de belles variations de couleurs. Les M2Tech respectent délicatement les atmosphères, et déroulent une écoute paisible. 

L’aigu n’est pas le plus aérien, ou lumineux qui soit. Pour autant, il s’intègre très bien dans une palette de timbres tournée vers une sensible clarté. Le bas du spectre ne cherche pas s’enfoncer sous terre : tenant bien sa place, il fourbit une vertueuse densité à la perception des instruments et leurs couleurs. Le médium est agréablement varié et la voix de Lana en bénéficie, naturellement.

C’est un dosage fin et apaisant entre les registres qui équilibre habilement harmonie spectrale et richesse des timbres, sans excès ou exubérance. Les harmoniques pourraient être plus variées, ou un peu plus savoureuses, soit, mais les parfums n’en sont pas moins délectables. Bravo.

Sur le titre, « Tu ne savais pas » sélectionné sur le nouvel album de Gaëtan Roussel (ex-Louise Attaque), les premières notes de guitare sèche mettent en valeur le frottement du médiator tout en caractérisant joliment les cordes. L’album abonde de moments où de tels détails de perception soulignent la compréhension du travail des artistes mis en évidence par le convertisseur.

Certains instruments semblent parfois simplifiés, d’une transcription convenue, plaisante mais manquant d’un rien de transparence. Nos écoutes séparées pointent du doigt la personnalité du Crosby et dédouanent le Young

Sur des œuvres de Mascagni et Leoncavallo enregistrées en 65 au Théâtre de la Scala de Milan sous de la direction de Herr Von Karajan, rééditées chez Deutsche Grammophon en 2018, les voix, ne serait-ce que par les écarts de teintes et phrasés, donnent la sensation d’une grande vraisemblance, cependant que Young et Crosby apportent un éclairage un peu répétitif des couleurs de l’orchestre. Il n’en reste pas moins que le résultant est tout à fait délectable. L’"Inneggiamo, il Signor non è morto" extrait du Cavelliera Rusticana de Mascagni est concrètement porté par la clameur des voix à l’unisson.

 

Équilibre tonal : 

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

Richesse des timbres :

DIAMs 4 Bleu

 

 

SCÈNE SONORE :

Restons au Théâtre de la Scala de Milan pour évoquer une scène sonore large et crédible surtout avec les Cadence « ++ ». 

Les voix de Fiorenza Cossotto, Giuseppe Taddei, Rolando Panerai et Carlo Bergonzi trouvent une place cohérente sur la scène. L’orchestre, clairement au premier plan dans la fosse, s’étire en largeur.

Les différents pupitres au cœur de l’orchestre restent épineux à différencier, pas aidés par la prise de son originelle. Pourtant le couple M2Tech réussit à démêler les pupitres y compris pendant les forte. Sur ces enregistrements, l’espace dessiné par le tandem fait complètement oublier la taille des appareils. Tous deux imposent avec maestria une salle de spectacle joliment proportionnée, à défaut d’en marquer la personnalité.

Autre prise de son « Live » : le concert intimiste de Robert Glasper en trio avec Vicente Archer et Damion Reid, au Studio Capitol, édité par Blue Note en 2015.

Piano, contrebasse, batterie, captés dans un petit espace où le couple Young + Crosby dénonce, par un placement un peu absurde, une prise de son multi-micros outrée comme il y en a trop, étalant la batterie sur toute la largeur : à gauche, la main droite du batteur sur une cymbale pendant qu’au centre la jambe gauche joue des contretemps sur le charleston ; quant aux toms, allez savoir.

Le piano central, se superpose en avant plan. Alors que la contrebasse de Vincente est positionnée à droite.

Un trio de Jazz, ce devrait être un exercice facile. 

Ben oui, c’est facile quand c’est bien fait. Et le couple M2Tech se sort plutôt bien de ce jeu de pistes en évitant d’en caricaturer les excès.

Scène sonore :

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 M2Tech YoungMKIVCrosby BasseDef 1

 

RÉALISME DES DÉTAILS :

Compte-tenu du budget, les joujoux M2Tech font preuve d’une retranscription des matières et du jeu des artistes très satisfaisante.

Néanmoins, n’attendez pas des complices Young et Crosby qu’ils jouent les dénicheurs de sentiers dissimulés, de pépites cachées dans l’ombre de la prise de son. Sur ce critère, il se révèle honnêtes, mais tempérés.

L’extension de note, le silence habité, cette impression de vie révélée par les plus infimes soupirs ne sont évidemment guère fréquents à ce niveau de prix. Et pour une parcelle d’éclairage supplémentaire de ci de là de la zone du spectre favorisée, mais incomplète, l’objet concurrent aura concédé de son âme en sacrifiant swing ou expressivité. 

Les M2Tech se comportent en bons élèves. Saluons ce qu’ils savent faire. 

Sur « la Folia » par Jordi Savall en 98, le violiste et chef d'orchestre invite à redécouvrir les charmes d’une danse populaire originaire de la péninsule ibérique qui s’est répandue à partir du 15e siècle au reste de l’Europe. Autour de la viole de gambe, on retrouve les musiciens Rolf Lislevand, vihuela, guitare, théorbe, Michael Behringer, clavecin, organo di legno, claviorganum, Arianna Savall, harpe triple, Bruno Cocset, basse de violon, Pedro Estevan, percussion, Adèla Gonzales-Campa, castagnettes et grelots. Tous ces instruments se particularisent, crédibles, nuancés. Les traits d’archet inspirés de l’artiste dénouent une grande diversité de traitement et d’ornementation. 

Ces circonvolutions hypnotiques finissent par gagner l’auditeur happé par la subversion sous-jacente de danses d’un autre âge. Qu’importe si le duo d’appareil n’est pas le meilleur expert en réincarnation, ce qu’il révèle fait place à la musique et à l’interprétation fine des artistes.

L’album de Piers Faccini, Shapes Of The Fall, proposé par Qobuz en 24 bit/88,2 kHz déballe une palette d’instruments acoustiques atypiques pour un tel artiste plutôt codifié ; l’oud, le guembri emprunté à la musique Gnawa, l’alerte de corne de brume et le timbre de la voix de Piers, tous se montrent d’une présence remarquable dans cette prise de son léchée.

De ces temps troublés émergents des œuvres, des artistes, souvent déjà connus qui, plus sensibles ou plus inspirés, savent dépasser la simple description de l’air du temps pour inviter à la mutation, au dépassement, à la résurrection au milieu des morts. C’est pour un de ces moments cathartiques que le diamant des Bad Seeds, Warren Ellis retrouve son acolyte Nike Cave dans l’album CARN AG E. La voix fatiguée de Nick, l’éternel rebelle, accompagnée de mix suaves et d’instruments aux sonorités équilibrées et subtilement assorties propose un voyage dans le sillage prophétique des deux amis

Pas très joyeux, me direz-vous. Oui, mais l’œuvre ne sombre jamais dans le pathos, étoffée d’arrangements qui participent à une mise en lumière délicate des textes. Dans ce fatras où tous : piano, synthés, sonorités métalliques, voix surannée, participent à la construction d’un chef-d’œuvre, le couple M2Tech Young Mk IV et Crosby ne passe pas à côté de l’enjeu, ne manque pas de déstabiliser. Impliquant que les détails sont suffisamment crédibles.

Réalisme des détails :

DIAMs 4 Bleu

 

 

EXPRESSIVITÉ :

Pendant mes écoutes j’ai apprécié tout particulièrement 2 disques : l’album du tandem Cave / Ellis et le dernier Opus de Faccini. J’ai également pu reprendre plaisir à savourer les œuvres de Mascagni et de Leoncavallo enregistrées au Théâtre de la Scala de Milan sous de la direction de Karajan.

Je ne me suis jamais senti tenu à distance, désengagé. Il m’a toujours semblé que les enjeux narratifs, les effets de jeu présentaient la bonne dose d’intensité pour saisir le récit musical. 

Ni happé, ni bousculé dans mes retranchements par une volonté farouche de me faire vivre l’instant passionnément, une forme de sérénité émane de ces écoutes.

Expressivité :

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

 

QUALITÉ DU SWING :

Une chaîne Hi-fi est prévue pour restituer la musique, n’est-ce pas ? Evidemment mais alors « toute » la musique ; sans rythme, swing ou groove, on renvoie de grands virtuoses du côté tâcheron de ces violonistes de rue qui jouent toutes les notes dans l’ordre, mais uniformément, comme on déchiffrerait une partoche.

Dès les premiers instants, j’ai perçu l’engagement opiniâtre des M2Tech. La musique, le rythme ne laissent pas indifférent face à un gospel captivant, ou plongé dans les vrilles d’une danse médiévaleJamais l’écoute n’est maussade.

Les M2Tech font sur ce critère un parcours sans faute qui nous oblige à féliciter leur sens musical. 

Qualité du swing :

DIAMs 6 Bleu

 

 

PLAISIR SUBJECTIF :

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

Plusieurs jours d’écoute plus tard, j’ai pu m’apercevoir que les albums s’enchaînent et s’écoutent souvent en entier. Les écoutes prolongées ne sont pas fatigantes. Et l’esprit vagabonde facilement bercé par les notes s’écoulant du couple M2Tech. Finalement, malgré des appréhensions idiophiles, je reconnais avoir grandement apprécié ces boîboîtes déroutantes.

Je recommande à qui n’a pas besoin de flatter un ego en affichant de grosses pétoires à vumètres d’essayer ces appareils.

 

 

RAPPORT QUALITE / PRIX :

Pour une fois, la montée en gamme des câbles d’alimentations n’a pas apporté de plus-value notable à l’ensemble testé. C’est même plutôt le contraire provocant une légère coloration du médium, comme sur vitaminé.

Le prix de l’ensemble « full options » envisagé d’un bloc reste un peu élevé à mon goût. Mais la modularité remet les pendules à l’heure. Dans le cas strict du couple Young + Crosby, le prix devient tout à fait justifié.

Ajoutons qu’on ne peut que saluer le design intelligent, épuré. 

En conclusion, les M2Tech constituent plus qu’une alternative : un véritable parti pris pour peu que la musique soit votre priorité sans trop de questionnement ou quête d’intériorité métaphysique. Ces deux objets savent convoquer une forme d’essentiel musical : un bon équilibre tonal, des timbres variés, une scène sonore étagée, un engagement et un sens musical indéniable…


Je suis quand même obligé d’avouer qu’il y a eu un petit débat entre nous au sein de la rédaction : les tyrans de l’expressivité, pas radicalement convaincus par le résultat global et les autres (dont moi) prêts à adhérer à un charme moins jusqu’au-boutiste.

DIAMs 4 Bleu

 

à 
DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

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