à l’oreille





Grandinote Mach 9 - La liberté de la vérité

Par LeBeauSon - Mars 2021


Perception d’ensemble

Colonne déjà d’un beau volume, la Mach 9 est idéalement armée pour combler les amateurs de toutes les musiques, plus épris de sensations émotionnelles que de cinémascope technicolor flashy permanent. A condition de ne pas se tromper dans la composition générale du système et de la mise en œuvre, parce que, elle-même intransigeante, elle n’est bienveillante qu’envers les musiciens.

Alors, la Mach 9 est-elle absolument parfaite ?

Non.

Est-elle unique ?

Par les moyens choisis, oui, peut-être.

Par la compréhension de la musique ?

Définitivement !

Est-elle universelle ?

Tout dépend de votre rapport à la musique et nous imaginons que d’aucuns ne sont pas forcément en accord avec le diktat du cœur.

Nous, si.

Ses électroniques avaient déjà fait entrer l’ami Max dans le club très fermé des concepteurs en hifi qui acceptent d’être les écuyers de la musique.

Ses enceintes en font un paladin.

DIAMs 6 OR

 

NB : code couleur de nos Diamants pour ce modèle : Or (supérieur à 12 000 €)

NB 2 : je préfère prévenir tout de suite que, ayant beaucoup apprécié ces enceintes, mon vocabulaire va dépasser – narcissiquement si vous voulez - les trente mots. Alors, que les nodocéphales néanderthaliens passent leur chemin d’emblée, ça évitera à tous la perte de temps.

 

Grandinote : un fabricant renommé d’électroniques qui se lance dans la conception d’enceintes… Mouais… Il n’est pas le premier, mais assez souvent le résultat est très discutable…

La circonspection est d'autant plus grande lorsqu'il s'agit d'un fabricant, comme c’est le cas ici, qui a développé un schéma unique mais surtout absolument abouti… cf. le banc d’essai consacré à une de ses merveilles : l’amplificateur intégré Supremo.

https://www.lebeauson.fr/a-l-oreille/167-grandinote-supremo

 

Aussi, malgré notre amour des électroniques de Massimiliano (M. Grandinote (non, ce n’est pas son nom)), on nourrissait quelques doutes à l’apparition d’une série d’enceintes appelée Mach.

Une première écoute des colonnes d’entrée de gamme Mach 4 sur un salon à Munich nous avait laissé une bonne impression mais sans plus. Cependant l’option technique choisie pour la charge, plutôt inhabituelle, n’étant pas pour me déplaire, j’avais grande envie de tester plus à fond cette première colonne, fine et logeable.

Bon, ça a été une Mach 9. Moins fine et logeable… On fait pas toujours ce qu’on veut. La version Carbone qui plus est.

Pourquoi cette précision ? Car la genèse de la structure de la série Mach a connu plusieurs étapes : une première réalisée en bois jugée non satisfaisante, puis une deuxième en aluminium jugée OK (celle que j’avais écoutée), suivie rapidement par un coffret en fibre de carbone jugée la meilleure. Rapidement accompagnée, toutefois, d’une nouvelle version bois utilisant des principes d’assemblages différents de la toute première, et proposée en parallèle à la version Carbone car significativement moins coûteuse pour un écart dit sensible mais pas décisif.

En revanche, les choix techniques n’ont pas changé : toutes multiplient les mêmes haut-parleurs de petits diamètres et la charge dépend des modèles, allant de close à une ligne façon labyrinthe et même bass-reflex pour un petit modèle (biblio). Connaissant l’avis de Massimiliano à propos du bass-reflex (que je partage), je suis sûr qu’il y a comme toujours le petit truc en plus ou le pas de côté car le trublion a l’habitude de ne rien faire comme les autres.

La Mach 9 va jusqu’au bout d’un principe peu utilisé en haute-fidélité appelé Line Array (parfois galvaudé) chez les pros, à savoir une succession de nombreux transducteurs identiques placés sur une ligne verticale parfois concave. Le principe revendique divers avantages flagrants :

- une augmentation de la pression acoustique disponible…

- … et même, selon la façon dont sont électriquement connectés les haut-parleurs et leur nombre, augmentation du rendement tout en conservant l’impédance nominale du haut-parleur de base

- baisse de la distorsion à puissance donnée

- un contrôle de la directivité puisque l’alignement est sur un seul axe.

Théorie entachée d’un ou deux points moins réjouissants :

- le point focal est reporté loin, dépendant du nombre de sources émissives et de la hauteur de la ligne.

- ce qui implique une précision de placement assez pointue, aspect d’utilisation évidemment moins problématique en sonorisation, voire positif.

- les haut-parleurs doivent être sélectionnés dans une tolérance serrée pour éviter un grand flou de restitution si chacun se débrouille de son côté. Dans le bas du spectre, les haut-parleurs étant dans la même charge, on peut considérer qu’ils s’auto-équilibrent par la pression interne, mais pour les tweeters, mieux vaut qu’ils fonctionnent tous ensemble.

- le risque d’augmenter les irrégularités de courbe notamment sur la fin du spectre des transducteurs grave-médium.

- le coût, évidemment, par la multiplication et le tri des transducteurs.

Grandinote FL9 2
 

Grandinote a axé sa production sur deux haut-parleurs principaux : un grave-médium de 13 cm (11 en apparence) spécifique avec quelques variantes de fréquence de résonances selon les modèles et un tweeter à dôme plutôt large.

Le haut-parleur principal reçoit un traitement à l’arrière de la membrane pour éviter des modes parasites et simplifier le filtrage électrique. Les haut-parleurs de grave-médium sont chargés par une ligne de transmission appelée SRT pour Semi Resonance Tube qui débouche à l’arrière de l’enceinte, en bas. Un moyen d’étendre la courbe de réponse vers le bas du spectre sans irrégularité et surtout sans désamortir les haut-parleurs.

La quantité de haut-parleurs est ensuite choisie selon les modèles pour conserver via un jeu de montage en série/parallèle une impédance constante équivalent à celle nominale du haut-parleur de base et augmenter le rendement. Ainsi, sur la Mach 9, comme son nom l’indique, ce sont 9 haut-parleurs de grave-médium qui sont alignés (3 groupes branchés en parallèle de 3 haut-parleurs en série) et 16 tweeters (4 x 4, comme son nom de l’indique pas). Le résultat est 99 dB de rendement pour une impédance de 8 ohms.

Inévitablement, la colonne est haute mais les dimensions générales sont équilibrées : 1590 x 300 x 300.

Pas de bi câblage, bravo, mais un bornier de qualité (WBT ?).

La finition fait apparaître le tressage du carbone mais dans une teinte brune moins « technique ». Le poids est étonnamment faible : 45 kgs. Un des bénéfices, outre la rigidité théorique, de la fibre de Carbone dont l’éventuelle résonance marquée à une fréquence élevée est amortie par la complexité de la ligne interne.

Les écoutes ont été effectuées via un lecteur réseau Kalista, un DAC Rockna Wavedream Signature XLR, Audia-Flight FLS10 et Grandinote Shinai et Supremo, câbles Alef et Van den Hul.

Pas dans mon environnement habituel mais une pièce que je connais bien et que j’ai pu me remettre en mémoire en écoutant au préalable des enceintes TAD. Nous étions trois (de l’équipe) pour cette écoute.

Nous nous y sommes repris à trois fois pour le placement en jouant sur l’inclinaison et le pincement des enceintes jusqu’à trouver la meilleure position, sachant que ces ajustements jouent légèrement sur les timbres et davantage sur la scène sonore évidemment, mais surtout sur la maîtrise d’une tonique un peu gênante au début des écoutes. Un point important : il s’agit de quelques centimètres, pas de devoir rebâtir intégralement la pièce pour disposer le système. Dans la pièce où nous avons fait les écoutes, l’éloignement excessif au mur arrière (4 m environ) n’était pas favorable à l’équilibre des Mach 9 qui, par leur rapidité même, ne détesteront pas le soutien d’un mur arrière. Euh… sans les coller non plus.

Ah oui, le prix de la version Carbone : 36 000 €

Pour info, la version bois tourne autour des 21 000 € selon les finitions.

 

NB : code couleur de nos Diamants pour ce modèle : Or (plus de 12 000 €).

 

Grandinote FL9 1
 

Richesse des timbres et équilibre tonal :

Début en douceur pour découvrir les hautes colonnes… Enfin, en douceur :      

Khatia Buniatishvili est rarement totalement douce, mais incontestablement impliquée. Et impliquante, quitte à en faire trop. Elle plaît ou elle agace mais j’aime bien la saturation de couleurs et audaces de « ses » Tableaux d’une Exposition (après tout la peinture de Hartmann est parfois flamboyante), œuvre dans laquelle j’ai l’impression qu’on a le droit d’en faire un peu trop ; surtout lorsque l’instrument est autoritairement sculpté comme rarement par la Mach 9 qui, nonobstant une matité insolite de l’aigu, brode une exceptionnelle subtilité de la dynamique, parant de mille nuances une fort belle unité des attaques, qui pourraient être un peu plus rapides, sans toutefois jamais donner l’impression de riper, contrairement à ce qui se passe sur une grande majorité d’enceintes ; l’aplomb statuaire du Steinway est d’autant plus impressionnant qu’il manque un peu de corps (éloignement aux murs ?) : la délicatesse est extrême pour en distinguer depuis les feutres jusqu’à la structure dans les plus infimes effets de matière.

Ça commence fort !

A l’exception d’une bizarre tonique sur certaines notes dans le médium qui pose question… Mais sera grandement résolue avec quelques mises au point comme nous le verrons.

Cette tonique étant vraiment agaçante, voire envahissante sur le morceau suivant : « When Poets Dreamed of Angels » de David Sylvian et Ryuichi Sakamoto, où la voix barytonnante de l’autre grand David retentit comme dans un tonneau, mangeant une zone large de la partie supérieure du spectre, il devient urgent de comprendre et agir. Divers tâtonnements de placement, pincement mais surtout une légère inclinaison vont grandement faire rentrer les choses dans l’ordre, même si fugacement encore, la sensation de boîte subsiste. Je soupçonne fortement que jouer aussi sur le type de supports aiderait, dans la pièce où nous étions en tout cas.

Mais une fois contourné ce petit désagrément, que de beauté : les trois guitares acoustiques, insensiblement typées par le refus de brillance de l’enceinte, se répondent dans une parfaite compréhension de qui fait quoi sous l’obsession maniaque de Mach 9 à révéler chaque diaphane scintillement de matière, palette coloriste ou attaque des cordes, bénéficiant qui plus est d’un déroulement dans le temps tissant une unité, un lien à la musique absolument idéal, malléable, particulièrement en étant passé au Shinai où le piqué tout en moelleux des cordes, des guitares ou pupitre de violons, frémissantes, retenues, est sensuellement séduisant.

Le ton est donné : l’expressivité est un point fort de Mach 9. Est-ce surprenant de la part du créateur du Supremo ? Non, évidemment.

Les effets de vibrato, la raucité de gorge que David Sylvian sait glisser aux moments les plus délicieux déploient un enchantement qui avec la Mach 9 dépasse la poésie pour atteindre à la beauté dans son acception première : l’harmonie des choses face aux sens.

Certes, l’enceinte s’exprime beaucoup plus clairement par la définition des matières que par le poids (que c’est terre à terre soudain), délivrant un grave très nerveux, détouré, nettoyé qui pourra surprendre les afficionados d’une épaisseur considérée comme normale dans la haute-fidélité, y compris haut-de-gamme ; point de corpulence ici, au point que moi-même, parfois, je me suis posé la question d’un petit manque ; pas énergétiquement, où au contraire la Mach 9 sait cogner, mais d’épaisseur. Etant entendu qu’il y une large gamme de degrés entre corpulence et obésité.

Ainsi, le single de Niki (Zefanya) « Wide Open », extrait de Moonchild - plutôt original au sein du mainstream hyper-codifié du moment -, dont la production est gavée jusque dans l’extrême-grave, peut sembler un rien éthéré, mais au bénéfice de teintes variées dans le bas, sans aucune aberration dynamique ou dérive tonale. On est certes un peu à l’os, mais on profite à fond de la créativité et la minutie du travail de l’équipe technique. Quant à l’auteure compositrice chanteuse indonésienne, on vit voluptueusement sa présence, les arcanes d’un organe plein, riche et charmeur, son sens du texte, les douceurs de sa prosodie qui propulsent un titre en apparence simple vers une perle des charts.

J’en profite pour recommander l’album, un bol d’air engageant, rehaussé de mysticisme, au sein duquel la jeune chanteuse n’hésite pas à révéler une forme pudique, voilée, de ce qui est à l’arrivée une sorte de vulnérabilité, voussure sensible que la Mach 9 dévoile sans fard.

Le possible déficit de corps ne nuit absolument pas à la justesse de l’équilibre tonal, mais on pourrait souhaiter un peu plus de confort. Sans vouloir prendre le risque d’épaissir la formidable et même exceptionnelle lisibilité du registre grave. Une fois encore, la distance au mur arrière est trop importante dans la pièce de test.

La coquetterie de lustrage dans le haut est un trait de caractère volontaire auquel on s’habitue très vite, qui privilégie la cohérence de densité face à une définition factice. Sevrage rapidement confirmé à la lecture de Julian Prégardien et Robert Reimer du Voyage d’Hiver (2018) dans la version « recomposée » par Hans Zender en 1993, peut-être moins délicate ou énigmatique, un peu plus brute que celle proposée en 1999 par Prégardien père avec le très inspiré Sylvain Cambreling, modèle de porcelaine et dentelle supportant la voix de Christoph, assurée et figurant le texte dans une idéale énonciation ; qu’importe, la version de Julian est passionnante.

A la dégustation de ce disque, je ne vais pas revenir sur la virtuosité de la Mach 9 à décliner les somptueuses couleurs si richement différentiées de la Deutsche Radio Philharmonie et la précision de chacun des interprètes surexposés par la mise en scène sonore de l’œuvre, parmi lesquels accordéon ou saxo ont fait bondir les puristes…

DIAMs 5 OR

 Grandinote FL9 4

 

Scène sonore :

… mais profiter de l’allégresse du ténor à entonner « Auf dem Flusse », dans un habile mélange de gaieté et nostalgie ; ou mieux : admirer le paysage sonore peint par les musiciens d’un conte empreint de mélancolie et d’une douleur ici très décente, les flots endiablés de la rivière, les méandres profonds, les évasements ensablés, l’écume d’une versification si amoureusement déclamée.

Soit, on ne peut nier que les plans sonores ne sont pas impeccablement installés, mais la pièce n’est pas innocente (c’est une faille récursive constatée sur d’autres enceintes) et nous sommes sans doute trop près de ces hautes colonnes. En outre, la captation est un peu artificielle. Pour autant, la facilité offerte à l’esprit de se promener et isoler à quelque moment que ce soit la particularité de jeu et la physionomie colorimétrique de chacun est déconcertante et structure la vraie scène sonore, celle qui compte.

Des musiciens consolidés dans des dimensions relatives homothétiques, enracinés dans le sol, oui, mais, mieux encore, des gradations de profondeur dans les matières et le grain de chaque instrument nous approchent de ce que nous avons connu de meilleur dans le genre et sur des enceintes ou systèmes nettement plus ambitieux ou encombrants. On retrouve ce que permet cette transmission harmonique si rare de la densité du grave – à défaut de corps – se vertébrant jusque dans l’aigu, créant un amarrage, un squelette indispensable et si rare dans la reproduction musicale, introduisant dans votre salon le jeune ténor, un peu détaché de l’orchestre (ou le trombone surprenant de vérité à l’extinction lente de « Der Leiermann »). Et ce malgré le résidu de tonique de boite qui voile (quasi imperceptiblement après les divers essais) le développement harmonique de l’ambitus du chanteur situé pile dans la zone du phénomène.

De Julian Prégardien, j’aurais aussi pu choisir la version très moderne, intérieure mais rafraichissante de la Passio Secundum Johannem par Benoit Haller et la Chapelle Rhénane chez Zig Zag en 2010, où le ténor allemand figure un très intègre évangéliste.

En vérité, sur une enceinte aussi résolument à part, chaque disque peut servir à louer tous les critères pour se résumer finalement par l’expressivité. Mais il est trop encore tôt pour en parler. Même, euh, je l’avoue, si c’est la deuxième fois que je cède à la tentation.

Aussi le long moment que nous avons passé à baigner intégralement, hypnotisés, dans l’architecture musicale, sonore, organique façon le Xénomorphe d’Alien, paradoxalement chargée d’humanité, bâtie par Einstürzende Neubauten (je ne me renouvelle pas ? Ben j’essaye, mais avouez que la production permanente de navets n’est pas toujours à la hauteur de divers référents), à savoir l’enchaînement « Bertold Brecht und der Weltempfänger » et « Musterhaus-Austellung » pourrait tout raconter de ces grandes colonnes italiennes (or, la communication entre l’Allemagne et l’Italie n’est pas toujours facile) : la finesse de détourage de chaque acte sonore dans une multitude pourtant complexe, entremêlée parfois éruptivement ou magmatiquement de nébuleuses boschiennes (Hieronymus) ou hurlements munchiens (Edvard), d’explosions de forges et de chuchotements angoissants, la dynamique parfaitement contrôlée, désarçonne sans que jamais la précision, le ciselé ne tournent à l’analytique, et assène au contraire le plus infime phonème à sa place, dans son environnement juste, parcelle nécessaire d’un grand tout holistique ; qui contribue évidemment à une répartition géographique d’une totale justesse détaillant sans la moindre ambiguïté géométrique le film expressionniste qui défile devant nos yeux. La focalisation dans l’espace est assez folle - à commencer par la descente de l’escalier métallique dont les réverbérations atteignent autant les entrailles que les oreilles -, respectant les moments mystérieux, évitant de jeter une lumière malvenue sur les zones d’ombres, impeccablement modelées, nous laissant pantois et secoués par tant de demi-teintes aussi habitées : un grand moment de saisissement.

Alors, bas-relief plutôt que perspective outrée d’un grand angle ? Possible… So what ?

En effet, là encore la profondeur n’est pas sans fond, mais la fascination à se balader dans l’espace sonore est telle qu’on ne s’en rend pas compte.

Après tout, le cinéma était jusqu’il y a peu - et majoritairement aujourd’hui encore - en 2D ; or, lorsque cadreur, décorateur, chef opérateur et réalisateur sont talentueux, les notions de relief, de points de vue, d’apostement relatif, les habiles jeux sur la profondeur de champ, les flous, les angles émorfilés… créent un paysage, un climat dans une perspective sans ambiguïté. C’est le même constat que l’on fait à l’écoute des Mach 9 : la mise en scène rigoureusement agencée lors de la production par Boris Wilsdorf est absolument respectée, décrite et surtout conquise par l’humain !

Un grand intervalle de plénitude - au sein d’une journée de travail intense - partagé à plusieurs !

DIAMs 5 OR

Pourquoi cette note ? Parce qu’à ce niveau de qualité, elle ne veut rien dire et pour rappeler à la précision de la mise en œuvre.

Par l’intensité musicale, ça pourrait être :

DIAMs 6 OR

 Grandinote FL9 5

Réalisme des détails

 

La quantité d’informations disponibles n’est que poudre aux yeux dès lors qu’elles sont mises en lumière par extraction. Il n’en est rien avec la Mach 9 : la floraison de microparticules sert une expression pure, par un prolongement palpitant des vibrations entrelacées, des articulations de modulations qui touchent au sublime ; ainsi Jehnny Beth confessant « We will sin Together » libère une abnégation bouleversante via la combinaison Grandinote, où elle apparaît moins fougueuse et énervée que d’habitude, pour - contradictoirement ? - frémir d’une fébrilité inavouée dans la belle complainte amoureuse. L’atmosphère urbaine en second plan, tel un monde lointain vaguement hostile ou indifférent à la douceur contrariée du désir, sublime les sensations intimes, les intentions du lyrisme, les tremblements induits par une transparence remarquable mais jamais démonstrative, longueur de notes et délié des enchainements brodés de fils de soie. A l’occasion de ce titre incorruptible, on découvre le plaisir supplémentaire de pouvoir écouter à un niveau très faible sans perdre le relief interne et corporel de l’expression, apanage des enceintes à haut-rendement soit, mais qui ne me paraissait pas aller de soi compte tenu de l’architecture de l’enceinte.

Une parenthèse très très agréable, émouvante, ça va de soie. Hum… Pardon.

Il y a un côté écoute au casque par un léger manque de fondation, ce grave rapide et un peu écourté valant mille fois mieux - bien évidemment - que le débordement dégueulé par tant de grosses enceintes. Le grave ici pourvoie le même sens des nuances et du fruité que l’ensemble du spectre.

Et il n’est pas du tout en retrait comme le prouve un passage par mes amis de NIN sur l’antinomique album Still et plus particulièrement « Gone, Still » et « and all that could have been » (titre de Danny Lohner)…).

La basse acoustique, joliment modelée, consolidée et pleine, pose une nonchalante présence physique superbement dosée face au piano. Douceur, énergie calme et mesurée, sans le moindre laisser-aller, bien au contraire, nous laissent en apesanteur, going, still…

D’une manière générale, on apprécie tout particulièrement la grande ductilité des modulations et les écoulements sous-cutanées des lymphes mélodieuses.

La Mach 9, sans être aussi véloce que quelques rares enceintes (à pavillons par exemple et pas toutes) (pourtant, Mach 9, c’est beaucoup !) se promène sur les chemins du naturel si peu fréquentés par la hifi.

On est cueillis dès l’introduction du 2ème Quatuor, Opus 3, de Mieczysław Weinberg par Arcadia (Allegro) par les sidérantes différentiations des timbres et caractéristiques de texture des quatre instruments au sein d’une vivacité enthousiasmante et d’une unité stylistique qui font de cet album un indispensable (en HR sur Qobuz)…

DIAMs 6 OR

 

Qualité du swing, de la vitalité, de la dynamique

 

… Et sur le même disque, le maintien de la densité et délicatesse dans des dynamiques variées et croisées, typique des enceintes à haut-rendement, très réactives, rapides, nerveuses, intensifient le plaisir pur. L’ardeur des musiciens est vraiment contagieuse.

L’affirmation du swing est évidente sur absolument tout type de musique mais un passage par Derrick Hodge « Gritty Folk » dynamite un sens du rythme à même d’animer une statue. Les cuivres, dont les matières rutilent joyeusement, ornementées de teintes inouïes, explosent à la figure comme un feu d’artifice.

L’extrême grave de la basse du Philadelphien, très chargé dans ce passage, est certes un peu court sur la Mach 9, mais amplement compensé par l’aplomb physique et surtout les glissements savoureux d’inflexions d’une totale sensualité ! Clairement, cette enceinte devrait être placée plus près d’un mur arrière pour récupérer du corps, mais ça n’est pas possible dans cette pièce d’écoute. Et puis franchement, la musique balance si allègrement qu’on s’en fout.

La basse de Derrick donne inévitablement envie de passer à celle de Rhonda Smith sur N.E.W.S du Kid de Minneapolis où le jeu de la belle canadienne rappelle les grands jours (passés hélas) de Marcus Miller car, sous l’égide du King (… Cause You’re a King, anyway…), les virevoltes de la basse sont au service d’un grand tout. Mach 9 confirme son efficacité, robustesse et cohérence physique ; et si, là encore, le grave est moins monumental que parfois, on passe du swing au groove avec une redoutable aisance, et aussi bien les glissandi puissants et vertigineux de la dame que les élucubrations millimétrées de John Blackwell obligent à visser les meubles au sol si on ne veut pas les voir s’envoler pour entrer en transe.

Quant à la dynamique, elle connaît toutes les variantes et nuances qu’on peut en espérer : Mach 9 bigarre la violence expressionniste lors du plus fabuleux climax de l’histoire de la musique dans le 1er mouvement de la 10ème Symphonie de Mahler, éclat de geyser brulant s’éternisant par la plainte lancinante d’une trompette agonisante, ou par les flâneries ironiques, grinçantes des scherzos, à la dramaturgie parfois macabre, parfois solennelle, comme par les lamentations distanciées dans le crépuscule écarlate du dernier mouvement, toutes errances magnifiquement tenues, maitrisées dans un total refus du spectacle par Osmo Vänskä qui préfère alterner les climats et les expressions par de fréquentes mises en abyme. Au sens artistique. Pour autant qu’il y en ait un autre…

Cette œuvre est un des instants qui nous ont amenés à revoir le placement des enceintes pour éviter une sensation bizarre d’un son un peu intériorisé accompagné de quelques flottements de timbres sur les forte. C’est probablement la rançon de l’excellence que de ne pas pardonner l’approximation de chaque critère de mise en œuvre.

Lhasa, très ambiguë femme blessée dissimulant la souffrance derrière les masques ambivalents de la gaieté et de la dérision, surprend dans « My Name », réquisitoire suppliant déposé à nu, voire à cru, par la Mach 9 en incroyable présence et abnégation, le swing intriqué dans la voix autant que les ricochets rythmiques de l’écrin des musiciens, si subtils et sobres, impeccablement en place, exhalant la grâce à l’état pur…

L’art est mimesis disait Platon. L’épanchement du cœur n’est l’imitation de rien et, bien que les larmes, même de sang, ne soient la preuve d’aucune qualité, Lhasa nous emporte dans le tourbillon de sa douloureuse vie - bien trop brève - sans que la Mach 9 n’édulcore ni ne nous épargne quoi que ce soit de la vérité de l’âme.

Libérée des carcans de l’esthétique, la beauté est multiple. Ici elle atteint au plexus…

DIAMs 61 OR

Ce qui conduit directement évidemment à la rubrique suivante :

 

 

Expressivité

 

Le point fort de l’enceinte ?

 

Point fort, difficile à dire puisqu’on aura remarqué qu’il n’y a quasiment pas de points faibles et d’ores et déjà compris que la longue analyse précédente a tout expliqué de l’exoréisme musical de ces enceintes.

Massimiliano a un énorme cœur et a su en pourvoir ses créations.

Après un passage enivrant par le violon de Julia Fischer et la 7ème danse de l’Opus 26 de Sarasate et en dépit d’un piano un peu terne, on enchaîne sur le très complexe mais inégalé Concerto pour Violon Op 15 de Britten par Vilde Frang (Frankfurt Radio Symphony, James Gaffigan, Warner, 2016. J’ai rien oublié ?).

Le boisé du violon est particulièrement véridique ! Et si le son peut sembler encore un peu coincé dans la boite ou l’extrême aigu réservé sur les forte - et même d’une manière générale -, cette matité est largement préférable à la mauvaise manie d’une brillance erronée dénuée de densité, alors qu’ici c’est l’inverse : la consistance immanente implante un relief interne à tous les instruments, cette notion qui m’est chère que la colonne vertébrale entière participe du même mouvement, de la plante des pieds jusqu’au sommet du crâne, autrement dit du grave à l’aigu ; et c’est d’autant plus jouissif que cela enrichit la compréhension des inflexions les plus frémissantes de la musique : le violon - porté par la grâce de la Norvégienne jusque dans les frôlements subliminaux - infuse un lien organique inéluctable dans les artères de l’auditeur. L’incarnation de la violoniste est particulièrement saisissante dans la Cadence (2ème mouvement).

Autre type de musique mais même degré d’émoi en savourant avec appétit la dernière réinvention des « Mots Bleus » par Christophe (Prégardien ? Mais non…), accompagné par Ryan Lott, dont la prodigieuse minutie du mixage est soigneusement délinéée par la Mach 9, de même que la présence physique du chanteur extrait du voile des premières mesures par une très belle idée de scénographie artistique ; le contraste surprend particulièrement ici. Le grave un peu bodybuildé de l’arrangement, souvent brouillon, est d’une totale netteté, pas du tout showing-off mais très juste, distinct, en place, et si l’extrême grave est tronqué, les harmoniques en sont timbrées comme rarement… La définition remarquable, toute en douceur, invite le chanteur unique dans la pièce d’écoute et nous donne envie de le prendre dans nos bras pour une étreinte posthume. Avec la Mach 9, Christophe « Bevilacqua » est réincarné, immortel.

Alors inutile de dire combien on aimerait prendre Sinéad O’Connor dans nos bras, après qu’elle a gravé dans nos esprits sensibles (si si !) « Red Football » et « All Apologies » ; la voix, quasi « adjurante » est poignante à souhait, jusque dans les murmures. Le piano est à la hauteur, grâce aux longueurs de notes et au lien harmonieux plus qu’à la richesse de la production.

Massimiliano nous assène un axiome derrière lequel courent de si nombreux amateurs d’art, perdus dans les contradictions de l’ancien et du moderne : la Beauté est la couleur avec laquelle on peint la vérité.

DIAMs 6OR 3Rouge

                                                                                        

Plaisir subjectif

 

Nombreux sont ceux, parmi les « critiques » qui nous moquent, qui ne comprendront pas l’approche de Massimiliano.

En elle-même, la Mach 9 est-elle absolument parfaite ?

Non.

Est-elle unique ?

Par les moyens choisis, oui, peut-être.

Par la compréhension de la musique ?

Définitivement !

Est-elle universelle ?

Tout dépend de votre rapport à la musique et nous imaginons que d’aucuns préfèrent le grand spectacle permanent à la justesse du cœur.

Pas nous.

Ses électroniques avaient déjà fait entrer l’ami Max dans le cercle très fermé des concepteurs en hifi qui acceptent d’être les écuyers de la musique.

Ses enceintes en font un paladin.

DIAMs 5 OR

Ou

DIAMs 6OR 3Rouge

 

Rapport qualité/prix

Hors sujet : la Mach 9 est absolument unique dans son approche engagée et sans concession de la musicalité, terme si grandement galvaudé qu’il faudra l’écouter pour comprendre.

Maintenant, je regrette de ne pas pouvoir comparer la version bois de façon à estimer le delta. Qu’importe : dans l’absolu, je ne connais aucun équivalent à la Mach 9.

Donc :

DIAMs 6 OR

Je suppose.

Grandinote FL9 3

Banc ecoute