à l’oreille





par LeBeauSon - Août 2020


Joie de vivre

PERCEPTION D’ENSEMBLE

Petite colonne conçue et fabriquée en France, l’AT16 est une chouette surprise ; de présentation originale, elle se révèle beaucoup plus généreuse humainement que gourmande électriquement.

AT16 n’est pas l’enceinte la plus respectueuse des timbres, mais leur définition par la matière permet vite d’en oublier les coquetteries.

… Elle scrute attentivement le travail de chaque instrumentiste, le positionne dans un espace cohérent ; et toujours cette sensation d’une affirmation incarnée et de grain interne des plus séduisantes.

AT16 accompagne l’exquis déroulement du si intuitif opus, pas très inventif en apparence mais où surgissent çà et là quelques originalités facétieuses d’arrangement qui surprennent et relancent la curiosité, au milieu desquels la voix issue des brumes d’un Harlem mythique nous promène allègrement…

… L’explosion des percussions, la dramatisation, poignantes, littéralement fracassantes et viscérales, continuent de grimper sans que la moindre projection sonore, perte d’intelligibilité, d’intensité des matières ou de corps ne menacent…

Pas de chichi avec l’AT16 : elle nous prend par la main, un peu comme celle ou celui qui nous contraint malgré nous à la ou le suivre vers un but inconnu, une soirée, un spectacle, un lieu, pour notre plus grande satisfaction à l’arrivée.

Cette enceinte est à même de créer une véritable empathie musicale.

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 ATLANTIS Lab AT13 BDef LBS 4

 

Si le nom Atlantis Lab ne vous dit rien, peut-être celui d’Atlantis Acoustique vous parle-t-il plus ?

Toujours pas ?

Bon : Atlantis Acoustique est une marque française qui, lors de divers allers-retours, a proposé des enceintes acoustiques depuis plus de 20 ans dont quelques modèles ont marqué les esprits et comblés de nombreux mélomanes, parmi lesquelles l’Argentera. Non, vraiment pas ?

Pas grave.

Atlantis Lab est donc une (antépénultième ?) renaissance de Phénix, appuyée sur une organisation d’entreprise passablement différente. Le concepteur est heureusement toujours le talentueux Eric Buy qui semble avoir conclu une bonne synthèse de ses diverses approches à travers le temps pour proposer une gamme homogène, en présentation et en principes techniques.

L’AT16 que nous testons ce jour est la première colonne de la gamme.

L’Atlantis Lab AT16 est un objet compact et, quand on a connu certaines étapes de la destinée d’Atlantis, d’une finition très convenable. Pour info : elle est fabriquée en France. En Auvergne plus précisément. Félicitations.

Plutôt basse (81 cm), trapézoïdale (en gros) d’une largeur passant de 24 cm à la base à 19 cm (au sommet donc, bravo !) pour une profondeur de 29 cm, le poids de l’enceinte (19 kgs) surprend un peu. La tranche est couverte d’un simili cuir au grain fin bien tendu et les flancs sont en chêne massif, rainurés pour des raisons acoustiques (fractionner la résonnance d’une paroi uniforme), ce qui à l’arrivée contribue à affiner le dessin.

On aimera ou pas cette sorte de pyramide tronquée, mais il a été intéressant de constater que les commentaires étaient tranchés et majoritairement favorables parmi les visiteurs qui les ont vues pendant la période de test.

Côté écoute, en revanche, les avis sont unanimes…

 

2 x haut-parleurs en façade, dont un 13 cm caché derrière un tissu, et une chambre de compression utilisée sans pavillon. La qualité de fabrication des haut-parleurs, venus du pléthorique catalogue du fabricant italien Eighteen Sound (des haut-parleurs du secteur « pro », donc), est absolument impeccable. Un deuxième haut-parleur de 13 cm est installé à l’arrière, identique à celui du frontal et sur le même axe. Le principe étant, par un placement précis dans l’architecture de l’enceinte, de renforcer le grave (surface émissive doublée) tout en annulant les fréquences médium redondantes internes par opposition de phase… Ces deux HP ne sont pas filtrés (belle performance) contraignant à un passe haut pour le compte assez compliqué. (Euh, oui, c’est un filtre dédié au haut-parleur d’aigu). A propos du filtre : pas de bi-câblage proposé. Merci.

L’évent de fort diamètre en façade gâche un peu l’apparence générale. Par l’intermédiaire d’une petite tige, il est réglable en profondeur pour une adaptation aux modes acoustiques de votre pièce. Indéniablement, le procédé fonctionne et peut rendre service. Dans la position où nous avons reçu l’enceinte, le grave était tout simplement épouvantable. Et tout est rentré dans l’ordre après quelques attentifs tâtonnements.

L’enceinte est livrée avec 4 énormes pointes (visiblement conçues pour supporter des piliers de pont pour TGV) qu’il est évidemment conseillé d’utiliser, quitte à protéger le parquet par des pièces de monnaie. La meilleure étant la pièce de 6 pence 1961 en forme de cœur retourné utilisée comme médiator par Brian May.

C’est pas drôle ?… Zut…

Compte tenu de l’équipement haut-de-gamme et des matériaux employés, on ne peut que louer le prix final. Même en ajoutant les pièces de 6 pence.

Le rendement annoncé de près de 95 dB (bon, 4 ohms aussi) est un peu étonnant mais le doute est levé à l’écoute : on sent que l’enceinte ne force vraiment pas sur l’ampli.

Les essais ont été menés sur des appareils assez différents, mais toujours cohérents en prix avec celui des enceintes, Atoll IN200 Signature et IN300, Tsakiridis Aeolos Ultra, Audio Analogue Puccini Anniversary…

Pour les câbles, on a alterné entre Absolue Créations In-Tim et Neodio, et, comme ça pour voir, on est aussi passé par des gammes nettement plus élevées.

Ah oui : 2 200 € la paire, prix public indicatif.

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RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL

Les enceintes reçues étaient rodées, aussi quand nous avons entendu le grave monstrueusement énorme des premières minutes avons-nous éclaté de rire.

A trois personnes, nous avons, avant de juger quoi que ce soit, passé une bonne heure à comparer divers disques pour jouer sur le réglage des évents (j’ai regretté de ne pas avoir mon équipement de mesure à disposition, mais est-ce que ça aurait tout dit ? Et puis surtout, les particuliers n’en disposeront pas ; et à l’arrivée on s’en passe très bien. Un peu de patience suffit.). J’ai eu la tentation de penser que peut-être même on pouvait en profiter pour ajuster différemment enceinte droite et gauche. Ou vice-versa. Mais le concepteur est formel : non ! En constatant que ce réglage joue aussi passablement sur l’équilibre du médium, on comprend mieux la réponse catégorique.

Je connaissais évidemment l’influence des paramètres de l’évent d’un Bass-Reflex, mais je pense que les effets en sont décuplés du fait du principe de couplage « acoustique » des haut-parleurs propre à cette enceinte.

Aïe, j’ai failli parler technique. Vilain garçon…

Allez, pour me faire pardonner, je vais commencer par un exercice impitoyablement exigeant pour n’importe quelle enceinte. Comment ça, je raconte à l’envers ? Oui, c’est juste, et non : l’ordre d’écoute n’est pas chronologique.

Schubert, Winterreise par Jan Martiník, accompagné de David Mareček. Une relecture dans la marge qui ne va certainement pas révolutionner la discographie - il faut dire bien fournie -, de cette délicate épreuve. Si le baryton/basse tchèque maîtrise un organe objectivement sublime, plein et fruité, il ne trouve pas toujours le ton dans les divers lieds (pluriel francisé) où il semble parfois même vouloir insuffler une certaine gaieté un peu à contresens de la tournure dramatique du texte. Le plus curieux est que parfois ça fonctionne (« Der Leiermann » (très paradoxalement)) ; d’autres fois ça se plante complètement. Mais malgré l’inspiration faiblarde du pianiste et le manque de propos du baryton, il ressort de ce disque une insolite plasticité…

Cette beauté tenant beaucoup aux timbres (et à une excellente prise de son), il est amusant de constater que si on est en premier lieu déstabilisé par l’équilibre tonal incurvé de l’AT16, qui rend par exemple la voix insensiblement nasale, on s’y habitue très vite, on pardonne facilement cette « réinterprétation » de quelques couleurs tant il y a des variantes de teintes, de grain, et surtout une sensation de présence charnelle opportunément sans le moindre surdimensionnement. L’AT16 rend probablement plus attachante cette version inégale en ajoutant une sorte d’intensité physique qui est une caractéristique de quelques enceintes à haut-rendement réussies. La main gauche du piano s’égare étourdiment dans quelques irrégularités de tension alors que vigueur générale et souplesse en sont respectées.

On vérifiera ces paradoxes sur la très agréable et plutôt humble reprise de « Strange Fruit » par Nokia Traore ; les timbres confirment une atypie pas déplaisante, au développement harmonieux, extraverti, très ouvert. L’aigu notamment « tintinnabule » d’une matière un poil artificielle cependant que, jamais dur ni métallique, il exprime une grande diversité harmonique à défaut d’exactitude et puis - et c’est un aspect particulièrement appréciable - il contribue à l’homogénéité de corps très caractéristique de cette enceinte qu’en aveugle on croirait bien plus balèze ! Ce qui ne signifie pas ventre où mollue. Euh, ventrue ou molle, malgré quelques suivis de percussions basses qui dénotent un peu, barbotant dans un relatif flou artistique ; le disque est chargé dans ce secteur, il est vrai. Attention, je ne parle pas de l’adiposité de la hifi majoritaire ! Ne mélangeons pas tout non plus.

Là encore, la sensation de proximité, d’une intimité inhabituelle (qui n’est pas sans rappeler les TAD) surprend agréablement.

Pour solder la question de l’équilibre tonal, j’essaye la n°5 des « Bachianas Brasileiras » de Villa Lobos par Sandrine Piau et Anne Gastinel. A défaut de précision, aucune épaisseur ne vient entacher la délicate diction des violoncelles, celui lyrique de Madame Gastinel et ceux bondissants de l’ONF ; la grande pureté et l’enthousiasme de la délicieuse Sandrine Piau sont élégamment respectés, en dépit des quelques errances colorimétriques.

De façon possiblement inique, j’ai acculé ces enceintes à leurs limites ; commencer systématiquement par la rubrique « timbres » est parfois un tantinet cruel ; objectivement, les AT16 ne sont pas les plus respectueuses des timbres dans la planète hifi, mais la définition de ceux-ci par la matière permet vite d’en oublier les coquetteries.

Parce que, pour le reste, c’est du bonheur.

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Je n’aime décidément devoir donner des notes. Elles n’ont leur place que sur une partition.

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SCÈNE SONORE

Typiquement un point où les AT16 sont très à l’aise : elles respirent ouvertement, procurent une idée du grand air, de la campagne verdoyante, évoquant irrésistiblement la virginité sauvage et contrastée de la région montagneuse où elles prennent vie, l’Auvergne !

Il faudra soigner le placement au cas où on aurait la sensation d’une « image » un peu basse, pas totalement incompréhensible au regard de la hauteur des enceintes. Or, le phénomène se contourne facilement quitte à les incliner modérément.

Très large et profond espace dans le Daphnis & Chloé de Ravel par François-Xavier Roth et « son » orchestre les Siècles. C’est d’autant plus intéressant que F-X a privilégié un échange intime avec les musiciens et son public, une lecture millimétrée mais infiniment sensible, jouant astucieusement des couleurs ravéliennes, sans le moindre relâchement de minutie dans les envolées spectaculaires – qui, au passage, se dilatent sur AT16 en évitant tout stress - nous exhaussant vers l’étourdissement par un sens de l’oscillation rythmique qui en fait une version indispensable…

AT16 scrute attentivement le travail de chaque instrumentiste, le proportionne dans un espace cohérent tout en l’incrustant physiquement dans l’atmosphère, imprimant inlassablement cette sensation d’une affirmation incarnée et de grain interne des plus séduisantes.

Avec ce disque seul je pourrais raconter l’AT16 car la petite Atlantis permet, nonobstant les afféteries de timbres, de comprendre idéalement la partition et surtout l’intelligence de la conception de l’orchestre par l’un des grands champions de la spécialité : j’ai nommé Maurice Ravel. Tout y est : transparence, clarté (en dépit d’une étroite zone de flou dans le bas, soit) révélant une architecture aussi bien « interne » - la structuration -, que « externe » : la mise en place.

On a déjà entendu ce disque pétri d’une sensualité plus marquée, peut-être plus en apesanteur aussi, mais les dialogues entre pupitres, la spatialisation, les équilibres délectables entre cordes, bois et cuivres nous sont livrés avec un enthousiasme qui sied particulièrement à la leçon d’expression offerte par un F-X en transe. On comprend également, via AT16, la particularité de facture ancienne (et appropriée) des instruments qui, à l’unité supérieure de phalanges historiques comme Vienne, Berlin, Dresde, que sais-je, oppose une éloquence individuelle affirmée. Et puis c’est de la musique française, pas du romantisme allemand. De l’air plus que du souffle. Quel bonheur !

La scénographie artificielle (et affectée) de la version irrévérencieuse  d’Also Sprach Zarathustra par Laibach contribue à vérifier la capacité d’AT16 à prendre possession de l’espace.

Oublions momentanément les diverses polémiques soulevées par la volonté de provocation pas toujours subtile de ce groupe de musique électro industrielle martiale avant-gardiste, d’origine slovène ; d’ailleurs cet album (illustrant une pièce de théâtre, inspirée par Nietzsche, pas par Strauss) n’entre pas dans la catégorie dégorgeant ou éructant des explosions métallurgiques ou militaires soviétiques qui renvoient Rammstein du côté de Walt Disney, mais est un voyage certes sombre, mystérieux, mélangeant l’épaisseur à l’aérien, des percussions venues des profondeurs fusionnées à des grondement de Rottweiler enlisées dans un ralenti d’apocalypse où la voix de Milan Fras (si c’est lui) est somme toute peu présente. Le côté « oppression soviétique » est toujours là, mais plus par l’esprit métaphorique que par la sonorité.

La lente progression de l’opus vers une angoissante tension – sans explosion violente et au contraire après une sorte de plage de repos exotique, « asiatique » chantée par Mina Špiler – passe par une mise en scène des sons où le mouvement dans l’espace agit avec une intensité égale à la productivité sonore, croisements de lignes défigurées, hurlements englués, détresse de cauchemar digne d’un « Hellraiser » au ralenti.

Un des domaines dont la facilité des AT16 à forger les substances dans l’espace révèle la quintessence.

 

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RÉALISME DES DÉTAILS

Est-ce paresse de transition facile où la tentation de parler d’une version absolument extraordinaire de Also Sprach Zarathustra ? Oui de Strauss cette fois ?

En dépit de beaucoup d’ajouts et complications, d’une exaltation frôlant parfois l’hystérie (Elektra), la musique de Richard Strauss n’en est pas moins dans la continuité d’une longue tradition germanique, de Bach à Bruckner en passant par Wagner ou Brahms. Je veux dire par opposition à Mahler, par exemple (en fait c’est l’unique exemple), qui, sans avoir revendiqué la moindre approche théorique novatrice contrairement à Schoenberg ou Webern, a quand même créé un chaos sans équivalent par ses empilages de couches, cadences, thèmes ou mélodies parfois inachevées, d’influences venant de tous les rivages culturels, philosophiques, religieux ou relevant de la psychiatrie. Ce qui explique probablement pourquoi il a longtemps été boudé en Europe.

Mais la lecture du « tube » (hum…) de Strauss par William Steinberg dirigeant le Boston Symphony en 1971 (Deutsche Grammophon) sort totalement de la filiation teutonne et renvoie à une tout autre perception, tant le ciselage de la lecture et la mise en lumière isolant chaque intervenant à chaque mesure ou note sont réellement hallucinants, minutie puissante qui plus est magnifiée par la superbe remasterisation Haute Résolution.

C’est évidemment la méticulosité du jeu, plus que la justesse des timbres, qui sur AT16 sera extirpée sans rien laisser dans l’ombre ; ce n’est pas un reproche : la captation et l’interprétation sont ainsi détourées, d’autant plus surprenant qu’il s’agit du BSO, le plus allemand des orchestres américains, surtout à l’époque : le perfectionnisme japonais sous la luminosité méditerranéenne, énonce imperturbablement une incongruité culturelle qui participe à la richesse de cette version de fait absolument incontournable. D’autant que le grain et le sens des matériaux des AT16 évitent ce qui sur d’autres enceintes doit pouvoir confiner à l’étisie. Ou aux coups de scalpel. Alors que ce n’est pas le cas de l’enregistrement ; mais la lumière en est si vive que le son peut vite mal tourner.

Or, même en plein soleil, un quidam dodu - comme, hélas, votre serviteur - ne paraît pas plus maigre.

La virtuosité inouïe que débobine individuellement chaque musicien apporte à l’œuvre une paradoxale poésie, un peu torturée, soit, mais où le delirium tremens habituel de l’œuvre (pardon Richard, je sais que ça n’a aucun rapport), sous le génie d’une lecture qui évolue chambriste, se transpose vers une hallucinante illumination, trente minutes où l’esprit est traversé dans toutes les dimensions par d’innombrables flèches de pertinence nous secouant au point où le corps en devient invertébré, les sens de disloquent ; l’épuisement spirituel guette mais la nuée de papillons est si belle que la faim en redemande quand, vertigineusement, s’éteint la coda.

On constatera également cette résolution opportune d’AT16 sur l’album de remix de Noir Desir, One Trip One Noise, où les revisites par des artistes d’horizon très hétéroclites et diserts exhibent un panel de couleur, mais aussi de sens du détail pour certains, de la globalisation voire du fouillis pour d’autres, avec - qui plus est - la singularité pas forcément flatteuse que la rythmique basse/batterie ou équivalent de ces réinterprétations (plus que remix au sens littéral) est souvent plus inventive que dans les morceaux d’origine. On profite pleinement des écarts sonores et finauderies (« Le Fleuve » par Franz Treichler, « à l’arrière des taxis » par Al Comet) ou le décalage superlatif (la version James Bond de « Oublié ») ou la préciosité paradoxale de « Lolita nie en bloc » resitué sur les riffs et rythmiques de « The Sidewinder » (quelle brillante idée, soit dit en passant) ou « A ton étoile » et son abord chambriste, sans parler bien sûr de la fulgurante transfiguration de « Tostaky » par Telepopmusik… Autant d’idées d’images, de sons, de fractionnements du style de chacun créant un album hybride qui n’est quasiment plus du Noir Dés

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QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE

Dans cette rubrique, pas de réserve : d’une part AT16 chante, mais surtout elle « envoie » !

Parlons swing d’abord ; pour le moins naturel et manifeste sur le « best-seller » (l’expression n’est pas très noble, je vous l’accorde) de Nat Adderley (le frère de l’autre) Work Song (1960), en compagnie de Bobby Timmons, Wes Montgomery, Sam Jones (au violoncelle !), Percy Heat (contrebasse, le violoncelle était déjà pris) et Louis Hayes qui déroulent le tapis rouge des fondements du jazz pur et super bien ficelé, avec la particularité du mariage d’un cornet et d’un violoncelle. Bien sûr, on n’est pas épargné(s) de l’équilibre tonal un rien physiologique d’AT16 mais, franchement, l’enthousiasme des pieds scandant incoerciblement la mesure escamote totalement la question…

Idem pour le chic direct, élémentaire, mais aussi habité de groove (en tout cas elle a bien appris) sur le fort joli album Junk de Hailey Tuck. Tombée du même arbre artistique (mais un peu plus tard) que Madeleine Peyroux, la chanteuse espiègle d’Austin (Texas !) sent précisément où placer les intonations, les sourires, la mélancolie, un petit accent ou un vibrato en suspens, élégie gourmande comme un sorbet en été, une personnalité forte, qui aurait eu sa place au Cotton Club. Ah, non : la couleur de peau ! Suis-je bête… Bon, comme cliente stimulée alors…

AT16 accompagne l’exquis déroulement du si intuitif opus, pas très inventif en apparence mais où surgissent çà et là quelques originalités facétieuses d’arrangement qui surprennent et relancent la curiosité, au milieu desquels la voix issue des brumes d’un Harlem mythique nous promène allègrement, entre nostalgie, clins d’œil à la Clara Bow, détachement relaxant et tendresse infinie.

Pourquoi n’ai-je pas gardé ce disque pour raconter l’expressivité ?

Ah ! Une expérience faite sans vraie arrière-pensée mais qui s’est révélée pour le moins ébahissante (techniquement, c’est un néologisme) : nous avons écouté The « Rythm of the Heat » de Peter Gabriel, un exceptionnel fichier DSD, dont la dynamique est sidérante, surtout le final des tambours de l’Ekome Dance Company décuplant les percussions de Jerry Marotta qui ne cessent de hisser l’intensité vers les sommets. Je me fais piéger à chaque fois sur le niveau final et suis souvent obliger de baisser en cours.

Pas là : l’explosion des percussions, la dramatisation, poignantes, littéralement fracassantes et viscérales, continuent de grimper jusqu’à atteindre un niveau où le plafond menaçait de s’effriter sans que la moindre projection sonore, perte d’intelligibilité, d’intensité des matières ou de corps ne pointent ; mieux encore, le grave qu’on a compris et admis un peu erratique sur AT16, est alors non seulement intégré mais d’une puissance de char d’assaut ! Avec un ampli de 30 W (le Tsakiridis pour cette expérience).

Voilà la preuve : le rendement n’est pas illusoire.

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EXPRESSIVITÉ

Je disais ci-dessus : pourquoi n’ai-je pas réservé à cette rubrique le petit bonheur de bonbon acidulé de l’album de Hailey Tuck ?

Il traduit parfaitement la particularité la plus attachante de l’AT16. Peut-on parler d’expressivité ? Oui, en un sens, et pourtant pas exactement.

Attention, afin qu’il n’y ait pas de méprise : l’AT16 nous embarque dans le wagonnet d’un féérique voyage au cœur de l’univers enchanté d’un parc d’attractions voué aux émotions de tout genre.

Toutefois, il y a une réelle nuance avec la réelle expressivité au sens de :  

"Une science subtile de l'égarement éclairera les plus humbles choses" comme me le répétait un ami…

Petit cadeau à ceux qui me trouvent suffisant.

Pas de chichi avec l’AT16 : elle nous prend par la main, un peu comme celle ou celui qui nous contraint malgré nous à la ou le suivre vers un but inconnu, une soirée, un spectacle, un lieu, certes pour notre plus grand bonheur à l’arrivée.

Donc, expressivité, oui, soit, mais surtout une joie expansive, revigorante, une générosité de musiciens de jazz hilares ou une immersion directe dans la crudité punk, qui englobe tout type de musique ; puisque, oui, Mozart était punk (Grunge ?), puisque, oui, les accents sont raffinés, les attaques de notes franches et directes et les suivis et extinctions délicats, même si pas toujours totalement cohérents, qu’importe : on est branchés sur la joie de vivre et partager, et même les deux doigts dans la prise !

Pour rassurer sur le danger que ça pourrait n’être que de l’énergie de sono (alors que j’ai longuement expliqué le contraire) un petit passage par l’archi-tube (décidément) « Pride » du groupe londonien vite oublié Syntax est une démonstration de groove enveloppant : la mélopée de guitare d’une simplicité biblique et qui pourtant construit un des riffs aussi remarquable que les géniales idées élémentaires de Keith Richards (avec 6 cordes au lieu de 5 toutefois), la voix chaude et débordante de sexualité de Jan Burton propre à faire vibrer la terre entière de phéromones, immergent dans un bain de volupté et même d’émotion totalement irrésistible…

Bref, on se sent moins confiné !

Moment de velours malaxé par l’étrange album Ventriloquism de Meshell Ndegeocello ; étrange en cela que la chanteuse bassiste nous avait habitués à des compositions personnelles assez complexes, qui ne s’abordent pas en lisant un bouquin ou en faisant la cuisine. Compositions intégrant, avec un sens de l’équilibre unique, la soul, le R&B, le jazz teinté de rock. Ici le cocktail fonctionne toujours impeccablement mais est consacré à des reprises ! Peut-être une Short List de quelques-unes de ses références ? L’album est en apparence plus facile, plus abordable, et pourtant la plupart des titres sont quasiment méconnaissables tant ils sont « réinterprétés », plus proches de nouvelles compositions par la complication des arrangements et des fulgurances ou heurts rythmiques imprévisibles, inexorablement d’un goût parfait. Navigation par mer calme dans des eaux truffées de récifs et ilots qui obligent à une surveillance constante, ou au contraire à laisser faire la nature, Meshell « Libre Comme un Oiseau » (traduction du Swahili) égraine un groove si naturellement porté par AT16 qu’on n’en mesure même plus la richesse pour lézarder dans un océan de caresses… Un lézard dans l’océan ?… Oh et puis zut !

                                                                                   

Alors expressivité, peut-être pas exactement, mais promesse de bonheur  direct, sans question, aussi vrai qu’un barbecue en été entouré de ses meilleurs potes, oh oui… Cette enceinte est à même de créer une véritable empathie musicale

Expressivité

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Empathie musicale :

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PLAISIR SUBJECTIF

Ben on a un peut tout dit dans la rubrique précédente, n’est-ce pas ?

 

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RAPPORT QUALITÉ/PRIX

Plutôt facile à mettre en œuvre, pas très encombrante et musicalement communicative, on aimera ou on détestera, mais la tiédeur n’est pas de mise… Nous, on a aimé.

 

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