Sclavis / Courtois / Pifarely
Asian Fields Variations

ECM Records - 2017 - jazz

Il n’est pas rare que ce genre d’exercice proposé par des musiciens aussi puissants soient-ils (et c’est le cas pour ces trois immenses artistes) tourne à une auto-contemplation cérébrale, ou un entre soi élitiste. Mais pas dans « Asian Fields ».

Dans une offrande d’un trio de facture classique mais qui ne l’est pas, sans viser non plus les repères menaçants du contemporain, la poésie domine jusque dans les instants qui pourraient prêter à une démonstration compréhensible de la part de tels virtuoses.

Le violon de Pifarely sort de sa gangue rhétorique pour voguer sur le lyrisme de Sclavis, éternel voyageur aux ailes puissantes, et le violoncelle de Courtois, bien sûr, sinue dans tous les espaces, libres ou occupés, son jeu semble aller de soi alimentant de couleurs insolites l’allégorique visite d’une Asie de carte postale.

Un thème comme un autre qui est sans doute une clef nécessaire pour doper mais contenir l’imagination de musiciens en perpétuels mouvements, sans jamais imposer une analyse quelconque, permettant à chacun d’y apposer ses propres rêves ; car c’est bien de cela qu’il s’agit : si la voie tracée est « asiatique » elle semble celle d’une vision onirique avant d’être un reflet politique ou culturel, ce que Sclavis sait faire par ailleurs, il l’a déjà prouvé.

Les trois musiciens, jouant comme un seul, croisant souvent les timbres comme on tisse une magnifique tapisserie, nous offrent des sonorités boisées, chaleureuses, ensorcelantes, rarement grinçantes ou acérées, et la prise de son respecte la richesse harmonique et rythmique des trois complices en excursion, à défaut d’une totale cohérence spatiale.