Par LeBeauSon - septembre 2017


Ça y est vous êtes décidé : prêt pour une écoute ?

Vous envisagez de vous offrir un beau système de reproduction musicale, ou au moins de découvrir ce que la technique peut vous apporter de frissons émotionnels …

A l’instant de pousser la porte d’un auditorium, un territoire nouveau, inconnu pour certains d’entre vous et aussi différent de l’un à l’autre que les pays du globe, il y a certains points auxquels il faut être attentif pour éviter une future déception qui ne sera pas forcément due à un mauvais conseil, mais possiblement à une mauvaise compréhension de votre attente, un malentendu.

Ce qui est dommage quand la musique est en jeu. Hum ?!!

Tout d’abord, ayez confiance en vous, votre oreille et votre amour de la musique.

Ne sous-estimez pas votre capacité à entendre : votre oreille, ou plus exactement votre système auditif compose votre sens le plus aiguisé, celui qui ne dort jamais, celui qui sauve l’homme dans la savane hostile, celui qui est capable de saisir plus de nuances que l’œil. Si si, je suis sérieux.


Essayez d’être décontracté.

D’une certaine manière, vous êtes sur le grill, le conseiller à un moment ou un autre va vous demander de vous exprimer et selon son ouverture d’esprit ou condescendance (ça peut arriver) vous expliquer que vous ne comprenez rien, voire être offusqué. Ecoutez ses arguments, ils sont souvent excellents, mais fiez-vous avant tout à votre ressenti en ne vous bloquant pas toutefois sur une seule ou première impression.

Mais exprimez-vous ! Expliquez ce que vous ressentez, permettez au conseiller de vous accompagner, vous expliquer, vous amener à pondérer votre jugement … Sans être dupe : l’émotion appartient à chacun.

N’oubliez pas que, sauf à être amoureux du matériel en soi (et pourquoi pas ?), une chaîne est un outil.

Or on ne demande pas à un outil d’avoir des états d’âme : je n’attends pas du marteau qu’il m’indique où planter un clou. C’est pareil pour une chaîne : elle est un outil de reproduction qui ne doit pas imposer ses états d’âme, sa couleur propre, sa simplification, son sens du beau. La beauté est celle de la musique, des musiciens, des sons originels…

Par conséquent, refusez les sirènes du son plus beau que nature et concentrez-vous sur tout ce qui est nécessaire à la musique vivante :

Grande variété de couleurs, nuancées et chatoyantes,

de rythmiques internes, tension nerveuse, de sensualité, de finesse des toucher ou des rebonds, les hésitations ou facéties des musiciens, le grain la matière, tout ce qui approche du naturel, de l’humain, de la nature du son…


Le swing.

Ecoutez attentivement le swing, voire le groove : s’il est mécanique ou absent, et croyez-moi ça arrive bien plus souvent qu’on ne le pense, il manque quelque chose d’essentiel. Quelle que soit la musique choisie, il faut ressentir ce balancement interne, ce cœur battant avec une régularité variable, pas comme une horloge, ce chaloupement, ce lyrisme dansant qui habitent la musique, les musiques doit vous exciter, vous faire vibrer, bouger, frémir, pleurer, rire, vous transporter, secouer, émouvoir, vous et personne d’autre. Ah si votre conjoint. Vos enfants. Enfin, qui vous voulez…


Et pour cela, choisissez-bien vos disques, variez-les…

Mais en ne vous focalisant pas sur la surprise de : « j’entends plus de choses que chez moi ». Ça ne suffit pas, parce que ça veut parfois simplement dire que l’éclairage est différent, mais pas nécessairement plus juste ou meilleur.

Ni, à contrario en vous cramponnant à l’idée que sur tel disque en particulier vous allez compenser tel défaut en particulier (l’aigu est crispant…) : vous risquez de passer à côté de l’essentiel (cf ci-dessus)

Idem : évitez, par inquiétude ou simplement parce que vous pensez que c’est « ça » qui manque sur votre chaîne actuelle, de vous concentrer sur un ou deux critères discriminants :

La scène sonore pour les uns (critère très dépendant de la pièce donc particulièrement glissant, nous y reviendrons), la profondeur, telle ou telle perception des aigus ou pas assez de grave, ou trop : la musique doit être perçue comme un tout et une bonne installation regroupera en une symbiose parfaites ces éléments disparates car ils sont liés, connectés, inséparables. Une mauvaise mise en phase nuit autant à la scène sonore qu’aux timbres, trop de grave ou pas assez, etc…

 

Dans le même ordre d’idées, ne venez pas en pensant : j’ai choisi ces disques parce que je les connais bien.

Non, car si vous venez pour envisager un changement, une évolution, une découverte, vous devez accepter au contraire que vous ne connaissez pas vos disques, ou imparfaitement ou déformés ; aussi devez-vous savoir admettre que vous vous trompiez.

Pour ces raisons, acceptez d’écouter des disques que vous ne connaissez pas.

Si le vendeur est un bon professionnel, il saura sentir vos goûts et vous proposer d’autres artistes, d’autres approches sur lesquelles votre ressenti sera vierge, ouvert à la découverte, au lâcher-prise.

 

Acceptez d’être surpris ! Pris au corps, au cœur, aux tripes.

En revanche, ne vous laissez pas séduire par une cuisse légère, ou un beau décolleté (ou quelque équivalent, mesdames), de ces disques passe-partout, ces chianteuses de jazz ou ces gros sons percussifs qui sont impressionnants même sur un mange-disque de 1975 : cherchez les variations, la sensibilité, la vie, l’incarnation, l’humain…

Attention au plaisir fugace, celui du bon gros gâteau plein de crème, qu’on ne supporterait pas tous les jours, celui tente mais qui écœure.

 

Essayez de sortir de vos habitudes, évitez de vous concentrer, là encore par inquiétude, sur l’idée que c’est meilleur chez vous finalement, ou pas très différent.

Car il y a énormément d’éléments que vous n’intégrez pas dans cette sensation vaine, parmi lesquels l’évidence que vous avez appris à intégrer les particularités de votre pièce inévitablement différentes de celles de l’auditorium qui, contrairement à une idée reçue, n’est pas forcément acoustiquement meilleur, à de rares exceptions près.

Exemple flagrant du point ci-dessus : après avoir acheté des enceintes, l’envie vous prend de changer votre amplificateur. Dans l’auditorium, vous aurez souvent l’impression que le produit proposé par le conseiller sur les mêmes enceintes est moins bon que le vôtre. Ça peut arriver soit, mais c’est souvent lié au fait que votre cerveau n’intègre pas la nouvelle pièce. La psycho-acoustique (ne riez pas, c’est une science reconnue) estime qu’il faut 3 semaines environ au cerveau pour intégrer les caractéristiques d’une pièce (et donc le plus souvent, les oublier).
Alors que, si vous venez avec votre ampli pour le comparer dans le même cadre, vous aurez une sacrée surprise tout simplement parce que vous aurez un référent.

Et donc, en absence de référent, faites confiance à votre oreille, votre plaisir (en le transposant sur le long terme), la boucle est bouclée.

 

Apprenez à identifier le revendeur :

Il a parfois fait des choix de raisons plus que de passion ou alors sa passion, si sincère ou engagée qu’elle soit, ne correspond pas forcément à votre attente.

Apprenez aussi à faire la différence entre les magasins qui ont clairement fait des choix forts liés à une philosophie d’écoute, ceux qui alignent des grandes marques par amour des objets, ceux qui empilent les références sans autre raison que de pouvoir être présents sur tous les créneaux.

 

N’oubliez pas que la comparaison de la médiocrité donne le choix du plus ou moins médiocre.

Nombreux sont ceux qui clament : mais quand j’ai écouté, j’ai choisi le meilleur. Oui, certes, mais dans un combat d’amateurs.
L’excellence s’impose d’elle-même, ne vous laissez par embarquer par un engouement furtif, un spectacle de court terme : le cinémascope d’Hollywood ne raconte pas toute la vérité et on se lasse vite d’un spectacle outrancier qui a séduit d’emblée mais ne laisse rien sitôt la porte fermée.
L’amour de la musique est un contrat de long terme, l’étreinte avec une maîtresse (ou un amant) de passage est un plaisir éphémère.

 

Le prix n’est pas un facteur de qualité et si la seule réponse proposée par le conseiller face à votre insatisfaction est de faire grimper le prix, posez-vous les bonnes questions :

1 - J’ai mésestimé mon exigence dans mon rapport à la musique
2 - Je ne suis pas à la bonne adresse.
3 - Ce n’est pas le bon jour, je ne suis pas d’humeur

Attention aux réponses toutes faites, aux affirmations formelles assénées par ceux qui savent pour vous.

Certains éléments de réponse vous appartiennent et un bon revendeur ne peut que vous décrire les curseurs en jeu, pas les positionner à votre place !
J’ai la faiblesse de penser qu’en sortant d’un premier contact avec un bon revendeur, vous avez plus de questions qu’en entrant. Mais les bonnes questions, cette fois, celles qui vous permettront, en regardant plus tard quelques années en arrière, d’éviter les regrets car :

Se tromper coûte cher ; vouloir progresser par étapes ou à-coups sans vision globale coûte cher ; imaginer qu’une bonne occasion est forcément un bon choix peut coûter cher ; mal estimer son budget en rapport avec son lien personnel à la musique, son importance dans votre vie, votre développement culturel possible, coûte cher…

Fuir les affirmations genre : la haute-fidélité, c’est une question de goût.

Pourquoi pas. Mais théoriquement on cherche à s’approcher au plus près de la vérité ou à tout le moins de la plausibilité. « Affaire de goût » éloigne du rôle majeur de la haute-fidélité : transmettre le plus scrupuleusement possible l’histoire qu’ont voulu raconter les musiciens, pas de créer une beauté factice qui conviendrait à votre goût.

Il y a une différence majeure entre l’émission et la réception. L’émission est factuelle et la réception, en effet, subjective.

Donc, si vous et moi et moi sommes au même concert l’un à côté de l’autre, nous apprécierons chacun à notre manière la qualité du ou des artistes. Aussi, si nous écoutons le ou les mêmes artistes sur une chaîne hifi, celle-ci doit nous permettre de retrouver nos différences de perception et pas les maquiller sous prétexte de coller à nos goûts.

 

Enfin, en tant que « client » vous avez aussi des responsabilités :

Evitez de tomber dans le bashing un peu facile qui considère qu’un marchand est forcément un vaurien qui se gave.

Les marges en haute-fidélité ne sont pas celles que vous imaginez et l’investissement des magasins (je ne parle pas des pousseurs de cartons ou des enseignes internet) souvent très élevé et constant.

Respectez le travail de ceux qui vous ont conseillés, guidés, procuré un enseignement, en renonçant à la tentation de foncer voir ailleurs si vous paierez un peu moins cher : la pseudo bonne affaire se paye à un moment ou un autre !

Voilà, j’en ai sûrement oubliés, mais ce sont des conseils de votre serviteur qui en est passé par là, a fait des erreurs de choix et de jugements et a longuement écouté d’autres passionnés de musique, ou de son, égarés face à d’autres totalement comblés …


Banc ecoute