à l’oreille





Alimentation externe EAT LPS

par LeBeauSon - Avril 2021


Perception d’ensemble

Le test réalisé ci-dessous en concerne pas que l’alimentation externe proposée par E.A.T pour ses deux premiers modèles de préampli-phono, mais l’idée en elle-même de pouvoir doper ou pousser jusqu’au bout certains appareils par diverses étapes.

Le test a été effectué sur le préampli-phono E-Glo Petit dont nous venions de terminer l’essai.

On verra ci-dessous que la pensée évolutive via l’alimentation externe LPS a largement du sens, d’autant plus qu’on pourra toujours décider un jour, avec la même alimentation, de choisir le modèle supérieur de pré-phono dans la gamme.

Alors logique absurde ou justifiée ?

Justifiée.

DIAMs 5 Bleu 1 gris

NB : code couleur de nos Diamants l’ensemble E-Glo Petit + alimentation LPS : bleus (1600 à 3200 €)

LPS EAT 4EAT E Glo petit 7

Lors d’un essai récent qui concernait l’E-Glo Petit, premier modèle des préamplis phonos de la marque Autrichienne E.A.T (je ne vous refais pas l’historique : référez-vous plutôt aux bancs d’essai des produits E.A.T.) j’évoquais la possibilité de faire évoluer le petit préampli phono dans le futur grâce à une alimentation linéaire extérieure proposée par la marque.

Il se trouve que, afin de découvrir diverses évolutions possibles, et dans un cadre n’ayant à priori aucun rapport avec le BE de l’E-Glo Petit*, nous avons reçu cette alimentation « linéaire » appelée sobrement LPS (pour Linear Power Supply) ainsi que des tubes différents, dernière solution que je m’étais refusé à envisager compte tenu du prix du petit préamp phono (je suis toujours un peu gêné à l’idée d’installer des tubes qui peuvent rajouter 20% voire plus à un petit appareil). Mais bon, une fois que je les avais en mains, c’était idiot, tant que je disposais encore du petit préampli phono, de ne pas aller jusqu’au bout de l’expérience. D’autant que les tubes qu’on m’a prêtés ne sont pas non plus des gloires impérissables parmi les NOS qui coûtent plus qu’un salaire moyen. Vous remarquerez que je n’ai pas précisé : horaire, journalier ou mensuel.

Il s’agissait de :

- 12 AX7 PsVane, fabrication chinoise haut-de-gamme actuelle qui a donné quelques tubes absolument remarquables, mais dont la fiabilité souvent douteuse, faute sans doute de tri sérieux (même en payant au prix fort chez un distributeur canadien qui prétendait détenir le haut du panier), nous avait fait renoncer à les utiliser sur nos appareils. Reconnaissons toutefois que ces soucis étaient plus rares sur les tubes d’entrées de type ECC que sur les tubes de puissance. De même peut-on envisager que les normes de la marque sont désormais plus rigoureuses.

- 7025 (NOS) marqués « National »

Deux précisions importantes : les tubes montés d’origine sur le préampli EAT sont protégés par des Cool Damper EAT qui ont deux fonctions : refroidir le tube afin d’allonger sa durée de vie (le bon vieux rêve de la science-fiction) et surtout - de mon point de vue – limiter la microphonie. Un tuto à venir ? Mouais, on verra…

Je n’ai pas voulu retirer les Dampers des tubes d’origine à cause de la colle employée, n’en disposant pas pour un transfert facile.

J’ai remplacé les Dampers par des bons vieux « Tube Rings » sur les PsVane. Que voulez-vous les Tubistes ont des manies.

Et par rien sur les « National » dont le diamètre plus étroit ne le permettait pas…

Quand ça veut pas, ça veut pas…

L’alimentation LPS peut sembler une plaisanterie par son encombrement : autant le E-Glo Petit est euh… Petit ?, autant l’alim prend l’encombrement d’un amplificateur. Slim-line, Peu importe, on peut toujours décider de la dissimuler, en dépit de la qualité de présentation : toujours les deux joues épaisses (laquées noires sur le modèle envoyé) encadrant un joli châssis en aluminium. L’arrière de l’appareil peut laisser perplexe mais tout simplement parce que l’alimentation est prévue pour plusieurs appareils, soit simultanément, soit de gammes diverses (platines et préampli phonos, y compris des platines Pro-Ject).

Nous avons séparé les tests (alimentation externe d’un côté et avec les tubes de l’autre) et j’ai repris l’énumération, à quelques détails près, des disques utilisés pour l’essai du E-Glo Petit, mais cette fois, pour ne pas perdre nos marques, sur une seule platine et cellule, à savoir :

Michell Orbe + Sorane SA-1.2 + Hana SL.

Amplificateur Kondo Overture II et, en enceintes, un prototype à tomber par terre que la déontologie m’interdit de citer.

Câbles Absolue Créations, Wing, Kondo.

Le prix de l’alimentation LPS : 1250 €

 

Soit avec le E-Glo Petit : 2600 €

 

Les tubes :

 

- ECC 83 PsVane : 90 € ?

 

- 7025 « National » : 350 à 400 € ?

LPS EAT 5

 

RICHESSE DES TIMBRES ET ÉQUILIBRE TONAL :                                            

Verklärte Nacht, Schoenberg, Boulez, New-York Philharmonic : « fluidité et ductilité des teintes, tendance édulcorées, créent un climat léger, où la finesse prend le pas sur l’incarnation. La densité - cohérente, à défaut d’être la plus organique qui soit -, procure une heureuse compréhension des matières et quelques effets boisés particulièrement agréables » - écrivions-nous dans le test du E-Glo Petit « nu ».

- Alimentation LPS : c’est précisément la densité qui progresse, l’épaisseur au sens noble du terme, comme un homme a plus d’épaisseur qu’un autre, par la qualité de son discours, son maintien. Ce seul aspect du gain notable de l’alimentation linéaire en justifierait l’acquisition !

- LPS + Tubes PsVane : on gagne en finesse, en subtilités harmoniques. En fermeté aussi. Le gap est moins bouleversant qu’avec l’alimentation seule et surtout l’équilibre devient sensiblement montant.

- LPS + Tubes « National » : modulation, grain, et sens des matières nettement accrus ! Quelles ductilité et saveurs…

« come with me » de Tânia Maria (The Real Tania Maria : Wild en 1985) : « avec notre copain du jour, l’EAT Iglou petiot, cette basse cogneuse comme un « sledge hammer » est parfaitement en place tonalement et, à défaut de ressentir la robustesse étourdissante qu’on sait pouvoir espérer de la tonicité de l’album, l’énergie ne s’englue pas un instant dans une mollesse exaspérante ou un flou artistique antiartistique… »

 

- Alimentation LPS : même constat que sur le LP précédent : la consistance de la basse de John Peña comme la voix de la chanteuse brésilienne affirment un aplomb assez sidérant en comparaison directe avec la version sans LPS, justifiant sans aucun doute l’acquisition de l’« accessoire »

- LPS + Tubes PsVane : les contours de chaque musicien sont mieux dessinés, plus affinés, peut-être au prix d’une légère illumination.

- LPS + Tubes « National » : ce qu’on reperd en contour, on le récupère en richesse harmonique et en atmosphère, comme si, en comparaison, les PsVane, certes supérieurs aux tubes d’origine, avaient quand même une tendance à tracer les bordures avec un crayon sec. Personnellement, la matité envoûtante des « National » me convient mieux, évitant une précision des pourtours par extraction.

Timbres et équilibre tonal de l’ensemble E-Glo Petit + LPS (je me contente ici de noter l’apport de l’alimentation externe)

DIAMs 6Bleu

 

 

 

SCÈNE SONORE :

- Alimentation LPS : « les grandes vagues des généreux pupitres du Chicago SO (Schéhérazade, Rimski-Korsakov, Fritz Reiner), peignant un paysage dantesque, aussi bien que le retour à l’intimité délicieuse du Premier Violon crépusculaire, circonscrivent des dimensions invariables de l’espace ».

- LPS : Le gain ici est moins flagrant et tient surtout à un meilleur ancrage des racines dans le sol redevable à la densité supérieure précisée plus haut.

- LPS + Tubes PsVane : le ciselé des instruments précise un peu plus chacun dans les pupitres.

- LPS + Tubes « National » : là encore, on est un peu en contradiction avec les PsVane : le ciselé paraît moindre, mais l’air autour des instruments plus « palpable », plus vrai.

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

 

 

RÉALISME DES DÉTAILS :

« … le petit E-Glo s’en sort dignement, soulignant particulièrement le sens des nuances de modulations (King Crimson, In the Court of the Crimson King). Il colle à la peau de l’opus là où il sera moins à l’aise dans la charge apparemment désordonnée de The ConstruKction of Light (2000) d’une formation finale du Roi Pourpre. Mais quel système peut l’être ? ».

- Alimentation LPS : la résolution bien supérieure des informations grâce à l’alimentation externe détricote plus clairement le « fouillis » apparent du morceau d’anthologie Larks’ Tongues in Aspic (sachant que la bâtisse crimsonienne est d’une rigueur hallucinante) sans pour autant rendre une justice absolue au travail de chacun, les idées sans cesse en évolution de Trey Gunn et les frappes continue de Pat Mastelotto donnent encore parfois l’impression d’un lâcher prise. Le E-Glo Petit a des grands frères, ce n’est pas pour rien.

- LPS + Tubes PsVane : un poil plus de netteté que précédemment, le registre grave, plus tendu convient évidemment au délire des musiciens dopés à l’adrénaline.

« Sonate n°2 « Marche Funèbre » de Chopin par Samson François (Columbia 1965). E-Glo Petit, par une honnêteté de lisibilité permanente, respecte un phrasé exceptionnel quitte à éroder discrètement la perception du clavier sous l’appui, en prolongeant en revanche longuement notes et réverbérations ».

- LPS : l’appui des notes est plus physiquement déterminé avec la nouvelle combinaison même si perdure l’impression d’enveloppes « enroulées ». Cette incision supérieure est accompagnée d’une enluminure possiblement dévoyée.

- LPS + Tubes « National » : à chaque fois, grâce à ces tubes visiblement remarquables - alors que l’apport des PsVane, incontestable, se fait par un éclairage plus lumineux au détriment de la souplesse -, on savoure un fruité savoureux et une agilité exceptionnelle. Les attaques de notes se dérobent toujours mais le velouté du toucher est exquis.

DIAMs 5 Bleu 1 gris

LPS EAT 3LPS EAT 1

QUALITÉ DU SWING, DE LA VITALITÉ, DE LA DYNAMIQUE :

Allez : je quitte les disques utilisés pour le test de l’E-Glo Petit pour varier les plaisirs : « Trio Improvisations », Chick Corea, Miroslav Vitous, Roy Haynes en 1982 (ECM).

                         

La notion de swing est compliquée dans cet exercice de jazz contemporain, où parfois perce l’influence du sérialisme et en tout cas du sérieux. Compliquée car chacun des « solistes » totalement impliqué dans la structure globale joue sur le sien propre. Cette dimension du paradoxe de la musique échappe à un petit préampli tel que l’Eglo éponyme sans cependant nous priver de l’inventivité inouïe des plages bien trop courtes de Trio Music.

- Alimentation LPS : l’aplomb des musiciens affirme plus fermement le jeu de chacun, charpentant les fûts de l’un, le boisé de l’autre, et la charge stylistique du patron. Le swing, ou plutôt les balancements internes en profitent-ils ? Non. Le résultat est bon, mais pas nettement meilleur, si ce n’est grâce à un déroulement rythmique plus posé par le changement global du centre de gravité énergétique.

- LPS + Tubes PsVane : certes un écoulement du temps plus limpide, mais l’humanité dansante n’est pas bouleversée pour autant.

- LPS + Tubes « National » : cette étape est intéressante car elle ramène à une perception plus prégnante du « naturel », sans toutefois atteindre nos référents.

Ce qui est toujours un problème pour nous (je veux dire : la capacité à relativiser). Avec nos référents, entre quand même dans une autre cour. Toutefois, pour avoir entre les mains au même instant un autre préampli-phono, prétentieux, très très coûteux et pas terrible (enfin si : beau, chaud, coloré et redondant, confortable, tous les défauts qu’on aime souvent de la reproduction vinyle : le plus beau que nature), je suis un peu égaré dans ma perception. Vous aurez compris que je ne me fatiguerai pas à réaliser le BE de la daube surestimée par la doxa puisque de toute façon la direction ne le publiera pas. J’aimerai bien le citer pourtant.

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Cette fois avec les tubes NOS.

 

EXPRESSIVITÉ :

Là aussi, changement de disque. Pour E-Glo Petit j’avais choisi Marilyn Monroe dans Le Milliardaire, alors je me suis dit pourquoi pas Yves Montand avec ce petit Bijou de Prévert qu’est « Sanguine ». Dans tous les cas de figure (avec ou sans alimentation externe et tubes «+ »), le plaisir d’un texte parfaitement articulé, d’une diction impeccable est addictif.

- Alimentation LPS : Montand sort de la ouate que l’on n’aurait pas forcément soupçonnée en première écoute avec l’E-Glo Petit seul, assume mieux son admirative virilité. Le gain est remarquable

- LPS + Tubes PsVane : les modulations susurrées s’inscrivent lisiblement dans un espace séparé de l’orchestre tout en nuance…

- LPS + Tubes « National » : enfin la sensualité est au rendez-vous, le texte prend plus de saveur langoureuse.

Pour autant, on reste en dessous de ce que l’on sait de l’expression de Montand sur ce même titre, à la limite de l’inconvenance, bourrée de suggestions lascives, d’une charge érotique si fortement gourmande que de nos jours la censure féministe lui tomberait probablement sur le râble. Le cadre de nos tests n’étant pas lié au politiquement correct, je me contente de constater que l’assaut malicieux de testostérone reste policé.

Lors d’un prochain essai, je me pencherai sur la version supérieure des préamplis phono de la marque, à savoir l’Eglo-S (2750 € sans l’alimentation LPS bien sûr) afin de voir si les chatteries indélicates de Montand révèlent le feu sous la peau dans la chaleur du feu à l’âtre.

DIAMs 3 Bleu 3 gris

                                                                                        

 

PLAISIR SUBJECTIF & RAPPORT QUALITÉ/PRIX :

Arrivé à cette rubrique se pose la question de la logique de l’acquisition de l’alimentation LPS.

On peut évidemment se dire qu’il y a une forme d’absurdité dans l’idée qui consiste à associer un joli petit préampli bien placé au milieu de la concurrence, qu’on a plaisir à montrer, à une alimentation qui soudain devient un appareil hifi standard (je parle de l’esthétique), d’autant qu’on arrive au prix du modèle supérieur de la marque à savoir l’E-Glo S.

Ben oui mais non. Pour plusieurs raisons.

- le problème esthétique n’est pas insurmontable, il suffit de dissimuler l’alimentation.

- un rapide comparatif permet un constat simple : E-Glo Petit + LPS est musicalement plus varié que E-Glo S seul.

- mais évidemment E-Glo S nanti de l’alimentation LPS aura son mot à dire.

En clair, cela signifie qu’on peut aller de plus en plus loin, progressivement, dans une logique de marque. Ce qui change la perception de toute notion de rapport qualité/prix.

Quant au plaisir subjectif, j’ai tiré la conclusion, à titre personnel, qu’il fallait probablement envisager l’E-Glo Petit directement dans cette cohérence évolutive. Je veux dire : en ayant en tête de le faire aller plus loin dans le temps.

Quand je dis à titre personnel, attention, ça veut dire dans le cadre de la logique de celui qui réalise des bancs d’essai.

Qui s’éloignent de plus en plus de ce que je voulais faire en acceptant l’exercice : parler à des primo-accédants de la haute-fidélité.

DIAMs 5 Bleu 1 gris

 

https://www.europeanaudioteam.com/

 

* Il se trouve que j’ai aussi entre les mains le modèle supérieur, donc le E-Glo S ; c’est pour lui que m’ont été envoyé Alimentation et tubes.

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